Les anciens du Stade-Français évoquent l’arrivée de Diego Dominguez à Toulon

Les anciens du Stade-Français évoquent l’arrivée de Diego Dominguez à Toulon

22 décembre 2014 - 10:11

5 Commentaires

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dominguezAncien ouvreur de classe mondiale, celui qui succédera à Bernard Laporte à la tête du RC Toulon en 2016 n’a aucune expérience de manager. Le pari est risqué. Mais l’homme est exigeant, intelligent et compétiteur.

Une minute. Il lui aura suffi d’une minute pour charmer le boss. « Quand j’ai parlé de la venue de Diego Dominguez à Toulon avec Mourad Boudjellal, il m’a dit : “J’ai été séduit dès la première minute”», raconte Sylvain Marconnet. Le patron de Toulon n’a pas dévié de sa première impression : Dominguez succédera à Bernard Laporte à la tête du staff technique du RCT dans un an et demi, une anticipation rare dans le rugby professionnel. « Un choix surprenant » , glisse Marconnet, qui a côtoyé l’ancien ouvreur au Stade Français, de 1997 à 2004. Dominguez était un grand joueur. Un grand buteur. Mais, que vaudra-t-il comme manager, lui qui n’a jamais entraîné la moindre équipe de club, à quelque niveau que ce soit ? « Il était sorti des radars », s’étonne aussi Thomas Lombard, partenaire parisien de Dominguez à la même période.

Difficile de deviner si l’Italo-Argentin portera beau son futur costume toulonnais. « On peut ne jamais avoir entraîné et être très bon entraîneur, note Christophe Dominici, autre acteur de l’aventure parisienne pendant ces sept saisons. Mais on peut aussi avoir entraîné depuis des années et être nul… » Évoquer Diego Dominguez, c’est ouvrir le livre des souvenirs du Stade Français. C’est fouiller un passé riche de mille anecdotes, qui délivrent toutes une même vérité : l’homme était une machine de compétition, un leader par l’exemple. Exigeant à outrance. Compétiteur à l’excès. Dans le top 3 des petites histoires le concernant, on trouve évidemment cette scène surréaliste de la finale du Championnat 2004 gagnée contre Perpignan (38-20). Son dernier Bouclier de Brennus. « En première période (30 e ) , je claque un drop alors que Diego était à côté de moi, raconte “Domi” . En se replaçant, il me dit : “Espèce d’enc.., le ballon, c’est pour moi.” Trois minutes plus tard, il met un drop à son tour. Et il me dit: “Je t’avais dit, le ballon c’est pour moi.” Ça prouve le garçon qu’il est… » Lombard, sur le même thème : « Il y a eu des matches où on menait 40-3, où l’on bénéficiait d’une pénalité et il disait à Vincent Moscato, le capitaine  : “Je la sens, je la prends !” Il voulait être le meilleur réalisateur du Championnat. Que ce soit lui et pas un autre. »

MARCONNET : « DIEGO N’EST PAS LE GARÇON LE PLUS CONVIVIAL DU MONDE, IL PEUT ÊTRE FROID ET DUR » 

Un jour d’été 1997, quand Max Guazzini le débauche du Milan AC, Dominguez arrive d’Italie avec cent kilos de pâtes et presque autant de café. « Des marques bien précises qu’il ne pensait pas trouver en France, sourit l’ancien président du Stade Français. C’est tout Diego : obsessionnel. » Lombard se souvient avec affection de Dominguez l’ascète. « Il devait manger des produits frais. Soledad, son épouse, allait au marché tous les matins. » Du Diego perfectionniste aussi. « Le premier à avoir exigé un sac à ballons. Le premier à s’être équipé d’un manomètre. Ses chaussures étaient toujours cirées. Et si un dimanche matin il était convenu avec Soledad qu’elle l’accompagnerait pour renvoyer les ballons dans son entraînement de tirs au but, il ne changeait pas le programme. Même s’il tombait des cordes à l’heure dite, et même si c’était son épouse dans l’en-but… »

Dominguez avait les clés de l’ancien stade Jean-Bouin, un véritable privilège…

Mais Mayol, c’est un autre jardin. Une autre histoire. Une culture et un contexte différents. Sur la Rade, ce sera un autre métier surtout. Doit-on s’inquiéter de son inexpérience dans le management ? « Ce n’est pas rédhibitoire, regardez tout ce qu’a apporté Ghani Yalouz aux athlètes, rétorque Marconnet au sujet de l’ancien lutteur, devenu DTN de l’athlétisme. Pourtant, en technique pure, il n’est pas invité… Diego, lui, il connaît très bien le rugby. » Et ses arcanes. « Il a un réseau monstrueux, rappelle Dominici. Il parle quatre langues (espagnol, italien, anglais, français). Il peut avoir Bernard Lapasset (président de World Rugby) ou le président de la Fédération néo-zélandaise au téléphone dans la minute. » La capacité de Dominguez à s’entourer d’adjoints en phase avec lui sera sans doute déterminante (*). « Cette idée d’arriver au 1er janvier 2016 pour travailler avec Bernard Laporte et son staff pendant un semestre, c’est une très bonne décision,glisse ainsi Lombard. On ne doit pas parler d’un remplacement, mais plutôt d’une transmission suivie d’une transition. Diego va observer d’abord. Il va s’imprégner de l’ambiance. » Sans compter que ce gros bosseur a un an devant lui pour élargir ses compétences. Se faire accepter d’un vestiaire rempli d’ego et qui perdra un manager les ayant conduits vers les sommets ne sera pas un mince défi. « Ça va être difficile pour Diego, approuve Dominici. Le plus dur commence. Ça me rappelle quand Georges Coste avait succédé à Bernard Laporte au Stade Français (hiver 1999). Ça s’était mal passé… »

Le caractère de Dominguez pose aussi question au poste de manager. Joueur, il était tourné à l’excès vers sa performance individuelle. On le décrit manquant d’empathie. Dans ses nouvelles fonctions, cela pourrait être rédhibitoire. « C’est sûr que, de prime abord, Diego n’est pas le garçon le plus convivial du monde, il peut être froid et dur même », souligne Marconnet. « À Toulon, il aura l’avantage de n’avoir que des bombes(sic) comme joueurs. Le plus dur pour lui sera de transmettre son esprit de compétition tout en montrant à ses joueurs qu’il les aime », acquiesce Dominici. Marconnet tempère : « Il peut aussi être chaleureux. Et charismatique surtout. Il n’était pas capitaine au Stade Français, mais il possède ce leadership qui lui permet de s’imposer dans un vestiaire. » Lombard évoque« une filiation » entre Laporte et Dominguez. Tous ceux qui ont connu l’actuel et le futur manageur du RCT soulignent leur même passion et leur même énergie.« Mais je crois aussi que, quelque part, Mourad veut être en rupture et ne cherche pas à réaliser un copier-coller avec Bernard », conclut Marconnet. C’est en tout cas un challenge énorme qu’a décidé de relever Dominguez.

Source: lequipe.fr

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5 Commentaires

  1. Ruck n ram 22 décembre 2014 à 10h- Répondre

    Et bien 2016 promet d’être une année intéressante avec son arrivée et celle de tous les internationaux après la coupe du monde !

  2. ron 22 décembre 2014 à 10h- Répondre

    De toute manière, pour venir à Toulon après Bernard Laporte et dans le contexte si particulier du club, il faut quelqu’un d’atypique, sans a priori.
    Pour l’instant, ce projet est intelligent et je ne vois pas pourquoi in ne tiendrait pas la route!

  3. alainc 22 décembre 2014 à 11h- Répondre

    Ce qui est excitant et attachant c’est que Mourad Boudjellal se fixe toujours des challenges ambitieux et ne reste jamais dans l’acquit et le train train d’une routine savamment organisée; c’est la raison pour laquelle le RCT est un club qui restera un ton au-dessus des autres et marquera l’avenir du Rugby Français.
    Attention ces challenges risquent d’être lourds de conséquences en cas d’échec, mais je suis sûr que MB a prévu le grain de sable et la manière de s’en sortir ou de rebondir, c’est la raison (a mon sens) de cette transition de 6 mois avec l’ancien staff, en cas d’échec Delmas et Mignoni peuvent relayer. A ce sujet Marconnet chercherait il a se placer????? lui aussi pote de BL?.
    Si MB gagne ce challenge, je crois que nous tenons en France l’homme providentiel qui est capable de réformer le rugby Français professionnel en profondeur et d’assurer la pérennité d’un Rugby Français et d’une EDF qui aurait bien besoin d’une refonte profonde et pérenne. Enfin ce n’est que mon avis,

  4. la Rafale 22 décembre 2014 à 11h- Répondre

    Putain, après Bernie le Dingue, Bielsa « el Loco », voilà Diego le Psychopathe.

  5. Mimo83 22 décembre 2014 à 14h- Répondre

    Passé l’effet de surprise lorsque que son nom a été évoqué, je trouve ce choix de Boudjellal intéressant.

    Il est évident que si ce qui reste un « pari sur l’avenir », ne marche pas, un paquet de monde se fera un malin plaisir de critiquer ce choix. Mais je préfère me positionner dans le camp des « optimistes », et je préfère voir le verre à moitié plein, plutôt qu’à moitié vide.

    Dominguez fut un joueur exemplaire, et il reste un sacré personnage. Et puis c’est une « gueule », aussi… Après tout, voilà une union « atypique » (une de plus ?), qui a tout pour fonctionner, sur le papier.

    Et à ceux qui répètent, à l’envie, que Dominguez n’a aucune expérience d’entraîneur, et qu’il ne serait, a priori, pas légitime pour prendre les rênes d’une équipe comme celle de Toulon, je pose une question : diriez-vous la même chose si Wilkinson avait accepté le poste ?

    Parce qu’accessoirement, si l’on fait abstraction de ce que notre Anglais préféré nous a apporté en tant que joueur, quid de son expérience en tant qu’entraîneur / manager ? Hormis quelques ateliers « skills » et son aide ponctuelle pour transmettre sa science du jeu au pied… ce n’est pas rien, mais ce n’est déterminant non plus. Et ce n’est absolument pas lui faire insulte que d’écrire cela, juste un constat : si on veut être impartial, il faut l’être jusqu’au bout, et surtout faire abstraction de l’admiration que nous vouons tous à Wilko.

    Je vous répondrai également que lors de sa nomination, Mignoni n’avait pas une immense expérience au poste d’entraîneur, même si lui aussi avait pris en charge quelques ateliers « skills » lors de sa dernière année en temps que joueur… Résultat ? Personne, aujourd’hui, ne remet en cause ses qualités de coach. Et de nombreuses personnes l’auraient bien vu prendre le relai de Bernard Laporte. Ce ne sera finalement pas le cas, mais je pense que cela ne s’est peut-être pas joué à grand chose… à une intuition, un « coup de cœur », de Boudjellal… l’avenir nous dira si c’était le bon choix.

    Mais bon, moi, la nomination de Dominguez, ça me plait. Ce personnage me plait. Sa vision et ses propos lors de ces récentes interviews ont plutôt tendance à me rassurer, aussi… Le mec fera tout ce qu’il faut pour mettre un maximum de chances de son côté.

    Sa rigueur, son leadership, son charisme sont loués par tous ceux qui l’ont croisé… Il peut aussi se montrer dur et intransigeant, dixit ces mêmes personnes… Mais je me dis qu’il vaut mieux ça qu’un mec qui pourrait plus « facilement » se faire « marcher les pieds », ne pas garder la main sur un effectif aussi pléthorique que celui du RCT. Il y a des similitudes avec Laporte, une sorte de « filiation », sans pour autant que cela soit un copié-collé. C’est intéressant.

    Il y a toujours une part incertitude, certes, mais avec Laporte pour lui transmettre le flambeau, avec ses relations et la légitimité qui est la sienne dans le monde du rugby (comprendre le monde avec un grand M), j’ai envie d’y croire.

    Comme d’autres ici, je suis parfois en désaccord avec certaines choses, et l m’arrive bien sûr de me poser des questions sur certains choix… après tout, c’est normal… mais pas dans le cas de Dominguez. Personne n’avait pensé à lui, mais plus les jours passent, plus je me dis que ça peut marcher, que cela peut être le point de départ d’un nouveau « cycle » pour le RCT… Et puis, si jamais cela devait ne pas fonctionner, gageons que Boudjellal saura retomber sur ses pattes. Aucun doute là-dessus, ou presque ^^