Mathieu Bastareaud: « Monsieur Boniface m’a envoyé une lettre »

Mathieu Bastareaud: « Monsieur Boniface m’a envoyé une lettre »

20 janvier 2015 - 9:32

9 Commentaires

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toulon-bastareaud1Mathieu Bastareaud s’exprime pour la première fois, dans « L’Équipe », après ses larmes au Stade Français, fin décembre.

Le 28 décembre, après une défaite du RCT à Paris (30-6), il avait craqué au micro de Canal +, terminant l’interview en larmes et se disant « au point de rupture » (lire par ailleurs ). Depuis trois semaines, très protégé par son club, Mathieu Bastareaud avance. On lui a présenté un boxeur qui devrait l’aider dans sa préparation mentale, Faïsal Arrami. « J’ai rencontré de bonnes personnes , dit-il sans entrer dans les détails. e vois les choses et les gens différemment. Je continue à faire le tri autour de moi.  » Hier, après l’entraînement, il a accepté de revenir sur ce moment délicat. Rieur et grave, alternativement, comme toujours.

« On vous a chambré pour votre double roulé-boulé sur votre essai face à l’Ulster (60-22), samedi ?

– (Sourire.) On en a rigolé un peu après le match. Mes coéquipiers n’ont pas très bien compris pourquoi j’ai roulé deux fois. Je me voyais plus loin de la ligne, je pensais que je n’aurais pas le temps de me relever. J’ai cru que le mec était sur moi, alors j’ai roulé encore une fois. Mais la note artistique doit être plutôt bonne sur cet essai-là (éclat de rire).

Steffon Armitage vous a qualifié de “ gymnaste ”…

– (Il rit.) Je travaille quelques acrobaties durant la semaine, des galipettes… C’est mon reste de formation de GRS !

Bernard Laporte confiait après le match que la dernière des choses à faire était de vous mettre à l’écart pour faire du physique car vous avez besoin d’être au milieu des autres joueurs en ce moment…

– J’avais demandé à pouvoir travailler de mon côté, lui n’était pas d’accord. Je n’ai pas très bien compris. Je l’ai un peu mal pris mais, mine de rien, le match du Racing m’a fait beaucoup de bien. J’étais 24e homme. Je me suis préparé avec les autres, tout en restant assez distant. Ça m’a donné de l’appétit. Le lundi, j’avais très envie de reprendre. Au final, c’était une bonne chose.

À Paris, quand vous avez craqué après le match, c’était un trop-plein, un ras-le-bol ?

– C’était une accumulation de plein de choses, professionnelles, personnelles. Et au bout d’un moment… Je suis humain, quoi ! Quand ça sort, ça sort. Je ne m’exprime pas beaucoup ; quand je prends le temps de m’exprimer une fois, deux fois, trois fois et que je ne suis pas écouté, eh bien… C’était mon ressenti du moment. J’ai toujours été comme ça. C’est mon caractère.

Ça vous a fait du bien ?

– Non, non. Au contraire. Ça ne m’a pas fait plus de bien que ça… (Silence.) On est dans un milieu professionnel de requins, il n’y a pas de place pour les faibles, les vulnérables.

Que voulez-vous dire ?

– Qu’il y a beaucoup d’objectifs financiers et sportifs, et pas de place pour les faibles. Le moindre moment de faiblesse, de doute, peut être exploité contre toi.

On a senti beaucoup d’affection envers vous chez vos coéquipiers, chez Bernard Laporte, comme un cocon…

– J’ai vu que, simplement, il y a un peu plus de regards vers moi. Mais il fallait que ça vienne de moi, pas des autres. Je n’ai jamais attendu des autres, ça ne commencera pas maintenant.

« SI ON M’ÉCOUTAIT, JE JOUERAIS QUATRE-VINGTS MINUTES TOUS LES WEEK-ENDS »

Vous répétez depuis le début de saison : “ Je ne suis pas bon, j’ai besoin d’enchaîner les matches. ” 

– À Toulon, ils ne peuvent pas faire autrement. Ils ont trente matches à me faire jouer (*), en comptant ceux de l’équipe de France. Ils n’ont pas de marge de manoeuvre. Si on m’écoutait, je jouerais quatre-vingts minutes tous les week-ends. Ce n’est pas possible.

Mais quand même, tout ça vous a contrarié ?

– Oui, bien sûr. En début de saison, je savais que ce serait comme ça, mais je ne savais pas que ce serait aussi compliqué pour moi. J’ai besoin de jouer régulièrement pour me sentir bien, avoir un bon rendement. Je l’ai prouvé dans le passé où j’ai enchaîné des saisons à plus de trente matches. Certes, j’avais toujours un petit pépin au genou, à l’épaule, mais je jouais…

La semaine précédant ce match au Stade Français, vous étiez en vacances à Londres. Ce break vous avait fait du bien ?

 (Une moue.) Moyen. Ça m’a fait couper du rugby, voilà pour le côté positif. Le côté négatif, c’est que j’étais à Londres, dans l’anonymat, et je me suis rendu compte que c’est ce qui me plaît le plus : pouvoir me balader dans la rue sans qu’on m’arrête toutes les cinq minutes. Forcément, quand je suis rentré à Toulon, j’ai eu le contre-coup. Je n’ai pas eu le temps de digérer. Avant le match contre le Stade Français, j’avais une sensation personnelle pas bonne, je cogitais. Et le scénario du match, où on a été pris à la gorge d’entrée, a fait le reste.

Vous vous êtes qualifié de “ zombie ” mais vous êtes retenu en équipe de France. C’est une bouée ?

– Je le prends juste comme une marque de confiance. Après le Stade Français, Philippe(Saint-André) a essayé de me joindre. Mais comme c’était en plein pendant les fêtes, je n’ai pas osé le déranger. Et je n’avais pas trop envie de parler à qui que ce soit.

« J’AVAIS ÉTEINT MES TÉLÉPHONES, J’ÉTAIS TOUT SEUL CHEZ MOI  »

Vous avez eu conscience d’avoir fait paniquer les gens autour de vous, le soir où vous avez pleuré ?

– Non. Et même pas après coup. (Silence.) Les réactions, je m’en fous un peu. Et, aujourd’hui, je me sens bien, tout simplement.

Vous avez reçu beaucoup de témoignages…

– Oui, pas mal de messages dans les deux ou trois jours qui ont suivi, mais je n’avais pas forcément envie de tout ça, je n’étais pas en état. J’avais éteint mes téléphones, j’étais tout seul chez moi, à la maison. Je n’avais pas envie de communiquer avec grand monde.(Hésitant.) Monsieur Boniface m’a envoyé une lettre…

André Boniface ? Il ne vous avait pourtant pas épargné (voir par ailleurs)…

– Oui, après un Mont de Marsan – Toulon. Il nous avait expliqué le rugby… Honnêtement, quand j’ai ouvert la lettre et que j’ai lu : André Boniface, j’ai fait : “Ooohhh…” Je pensais en reprendre une couche. Je ne m’attendais pas du tout à ce qu’il m’écrive. J’ai été agréablement surpris. Il me dit qu’il a été touché par mon interview, que je dois garder confiance et que les bons moments reviendront. Je ne le connais pas, sauf de nom ; je n’ai pas pu le remercier et j’en profite pour le faire, là. Cette lettre, je l’ai gardée et je la relis de temps en temps. (Très sérieux.) Elle m’a touché.

Vous avez prévu d’inviter André Boniface à un match ?

– Non, mais quand je le croiserai, je le remercierai.

Vous pourriez lui dédier une passe croisée…

– Non ! Plutôt mon prochain roulé-boulé (rires).  »

Source: lequipe.fr – Arnaud Requenna

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9 Commentaires

  1. Reg 20 janvier 2015 à 10h- Répondre

    Vu ses commentaires ça m’étonnerai pas qu’il quitte toulon à la fin de son contrat…

    • jocolombe 20 janvier 2015 à 10h- Répondre

      Heu, je ne vois pas du tout ce qui vous fait dire ça.
      Je pense au contraire, qu’il a bien mieux vécu son ou ses coups de blues à Toulon que s’il était ailleurs, notamment à Paris

      • Reg 20 janvier 2015 à 12h- Répondre

        Tu vois pas quil est blasé??? Sans dec

  2. Gaya 20 janvier 2015 à 11h- Répondre

    Il me dit clairement la règle des 30 matchs l’a plombé !

  3. Personne 20 janvier 2015 à 11h- Répondre

    Chacun a droit à son jardin secret et au respect de sa vie privée ! Même si l’intérêt porté par les supporters à Matthieu est dicté par la bienveillance, l’admiration, l’affection, il est peut-être quelquefois, en certaines circonstances, difficiles à assumer. Laissons à Matthieu le temps nécessaire pour retrouver un équilibre qui lui convienne, assurons-le de tout notre soutien ! Rappelons-lui aussi que tous les plus grands artistes portent en eux une ou plusieurs félures qui les rendent exceptionnels ! 🙂

  4. Mayk83 20 janvier 2015 à 12h- Répondre

    La question est pas « est-ce qu’il doit quitter Toulon? » mais plutôt « est-ce qu’il doit arrêter le rugby? ».
    S’il n’est pas épanoui dans ce qu’il fait et qu’il préfère jouer au bille c’est son choix et ça se respecte.

    • jak84 20 janvier 2015 à 12h- Répondre

      Le gars explique qu’il se sent mieux quand il joue tous les matchs et vous en concluez qu’il devrait arrêter le rugby pour s’épanouir ?
      C’est assez étrange comme raisonnement.

      • Mayk83 20 janvier 2015 à 12h- Répondre

        Il dit aussi qu’il était bien a Londres dans l’anonymat, ça me parait compliqué pour lui de garder l’anonymat en continuant à être sportif professionnel.
        Et quand je dis ça c’est sans animosité, j’adore le joueur comme le personnage mais s’il n’est pas heureux dans cette vie il doit en changer.

  5. bison25 20 janvier 2015 à 15h- Répondre

    MATHIEU !.. Pour le ROULE BOULE ma poule : note artistique 10/10 :yes: Un vrai Kiffe ..
    Et pour ton HUMOUR incomparable : ce sera aussi un 10/10 :rotfl: :rotfl:
    Vachement content qu’ANDRE t’eus écris , j’en reste scotché et très emu . Il est venu chercher ton pardon MAT , c’est les anciens ça , tu vois . Tout en ayant mine de rien . Un grand MERCI va lui suffire , pas besoin de long discours avec eux .