On l’avait quitté en larmes au micro de Canal + un soir de défaite du RC toulonnais au Stade français (30-6). C’était le 28 décembre à Jean-Bouin, le dernier match du Top 14 de l’année 2014. Le monde du rugby s’était fait du souci pour lui. On avait du mal à expliquer comment une baraque comme lui, cette force de la nature, pouvait craquer devant l’objectif des caméras et avouer son mal-être à la France entière. Après cet aveu de faiblesse, ce coup de blues, ce début de déprime, le trois-quarts centre international avait disparu des radars, était sorti de la lumière trop crue des projecteurs de l’actualité.

Trois semaines après, il a refait parler de lui en bien, et sur le terrain. Finie l’exhalaison de mauvaises pensées au détour d’un couloir. À Mayol, il a choisi le silence, passant devant les journalistes sans s’arrêter mais sans véritablement les fuir. Manifestement, il ne souhaitait pas parler. Il s’était exprimé sur la pelouse, cela devait lui paraître suffisant. À la 33e minute, on l’avait vu recevoir une passe de Steffon Armitage, s’arracher le long de la ligne de touche sur une vingtaine de mètres pour servir Brian Habana qui marqua l’essai qui fit basculer le match en faveur du RCT. À la 49e minute, il avait pris le milieu du terrain sur une attaque en première main après touche faisant montre de sa puissance. À la 57e minute, il était intervenu dans l’action qui s’acheva par le premier essai d’Armitage.

ROULÉ-BOULÉ

Mais c’est surtout à la 37e minute qu’on le vit le mieux. Toulon était à l’attaque et Tillous-Borde avait le ballon en main. Le demi de mêlée servit Sanchez, son ouvreur, qui perça et trouva le soutien de Bastareaud. Ce dernier à proximité de la ligne d’essai fut mis au sol, roula, et une, et deux, et trois fois, pour finir dans l’en-but. Essai, transformation de Halfpenny, 27-10, la messe était dite. Le roulé-boulé de Bastareaud n’a pas fini de tourner sur les sites de vidéos en ligne !

Sorti sur coaching à l’heure de jeu, on le vit sur le banc des remplaçants donner une bourrade à Nicolas Sanchez, l’ouvreur qui le plaisantait sur son essai gaguesque, sinon casquette, marqué après une figure de style inédite. Si Bastareaud avait choisi de se taire, Bernard Laporte parla pour lui. « Nous avons bien fait de le conserver dans le groupe après Paris, dit-il. Certains disaient qu’il fallait le tenir à l’écart et qu’il s’entraîne seul. Si nous avions fait cela, nous aurions commis une erreur. » Sur ce qu’il montra contre l’Ulster, c’est une évidence. Avec cette qualification pour les quarts du Champions Cup à laquelle il apporta sa pierre, avec sa présence sur la liste des trente pour le Tournoi des 6 Nations, Mathieu Bastareaud commence l’année 2015 – il n’avait joué contre le Racing – de la meilleure des façons.

Source: Midi Olympique