Le Munster, le Top 14, le Racing-Metro, les transferts, Fabien Galthié, les droits TV… Le président du RCT répond à tous les questions et n’hésite pas à se lâcher. Du Boudjellal dans le texte.

Toulon-Munster, est-ce le match de l’année?

J’espère que non. Il faut que ce soit un début et non pas un aboutissement.

Vu l’engouement que suscite ce match, regrettez-vous de ne pas l’avoir programmé au stade Vélodrome?

C’est sûr qu’on aurait rempli le Vélodrome, mais je ne regrette rien. Ce match va être médiatisé comme rarement un match de rugby l’a été. Il sera en direct sur France 2, Sky Sports et Fox, ce qui veut dire qu’il sera visible en direct en Nouvelle-Zélande, Australie et Afrique du Sud. Je suis content que le monde découvre le stade Mayol. Pour une première, c’est quand même bien que cela se passe chez nous.

L’équipe jouera-t-elle en bleu ou en rouge et noir?

On n’a pas de nouvelles de l’ERC, mais on va jouer en rouge et noir. Je ne sais pas traduire en anglais «empêchez-moi» !

Le choix de jouer dans vos couleurs traditionnelles n’est-il pas une façon de déjuger le maillot bleu?

Pas du tout. Vu la médiatisation mondiale de ce match, je trouvais bien de jouer dans nos couleurs habituelles car les photos et les images de ce match vont circuler dans le monde entier et rester en archives. Mais nous jouerons en bleu la semaine d’après aux Ospreys, comme en quarts de finale, si nous nous qualifions.

Que vous inspire la requalification de l’Irlandais Paul O’Connell, suspendu pour mauvais geste, juste avant le match?

Ce n’est pas surprenant. Il y a des sanctions et des «euros sanctions» et quand on est Irlandais, on prend des «euros sanctions» divisées par 6,55957, ce qui fait qu’O’Connell a pris un mois au lieu de six mois et demi. Après, qu’il y soit ou pas, le Munster reste une équipe énorme.

Si on vous avez dit après la défaite au Munster (45-18) en octobre dernier, que vous les recevriez pour les éliminer, l’auriez-vous cru?

Au début, je voulais jouer le Munster lors du premier match pour assurer la recette du stade Mayol. En les recevant à la cinquième journée, je me suis demandé comment j’allais remplir le stade. Aujourd’hui, non seulement, le stade sera plein, mais il y aura de l’enjeu et dans le le pire des cas, on sera heureux. Même en cas de défaite, on aura vécu une belle histoire en H Cup pour une première participation. Maintenant, je rêve d’une victoire face au Munster et d’une autre victoire des London Irish face aux Ospreys. On serait qualifié et on vivrait une très belle journée dans l’histoire du club. Et puis, il ne faut pas perdre de vue qu’une qualification en quarts de finale nous garantirait d’être dans le chapeau 3 pour la saison prochaine (classé 30e club européen cette saison, le RCT avait été tiré dans le chapeau 4, Ndlr).

Revenons sur la défaite 15-12 au Racing-Métro. Voilà que votre ami Jacky Lorenzetti mène deux à zéro cette saison…

Oui, c’est sûr, mais ce sera peut-être la troisième rencontre la plus importante. Je suis très satisfait de l’intensité que nos joueurs ont mis dans ce match. On ne va pas s’éterniser sur les problèmes du rugby, mais on ne peut pas gagner quand on n’a pas une seule pénalité à tenter en deuxième période. Je félicite l’équipe de Pierre Berbizier qui ne fait jamais de fautes dans ses cinquante mètres. Ils ont fait une mi-temps idyllique et nous, nous ne sommes pas à ce niveau.

En fin deuxième période, on sent bien que l’arbitre n’ose pas lever le bras...

Il y a un plaquage haut et un drop de Jonny contré non sanctionnés. Soient les Racingmen sont hors-jeu, soit Usain Bolt a du soucis à se faire ! Personnellement, j’opterais pour la première solution…

Quel sentiment domine ? De la fierté ou de la frustration?

On a pris un point que tout le monde ne prendra pas au Racing. Le groupe a de l’ambition et prouve qu’il est au niveau du Racing, peut-être même au-dessus, car il jouait à l’extérieur et les conditions lui étaient défavorables. On a montré que notre jeu d’attaque, critiqué en début de saison, est de plus en plus intéressant. On est sixième en ayant joué plus de matchs à l’extérieur qu’à domicile (neuf contre sept, Ndlr). On est dans les clous en ayant laissé beaucoup de points en route, notamment à Brive, à Bayonne et lors des deux défaites du début de saison à Mayol, sans être prêt. De toutes les équipes du Top 14, on est celle qui utilise le moins son réel potentiel. On peut rivaliser avec n’importe qui. La seule problématique, c’est que Bourgoin va fausser le championnat et que désormais, tous ceux qui iront jouer chez eux auront un avantage par rapport à ceux qui, comme nous, y sont déjà allés.

On a rarement vu Philippe Saint-André dans un tel état. Comprenez-vous son désespoir?

Il sent qu’il a un vrai groupe et il aimerait être mieux payé. Il en a marre des joueurs qui plongent sans être sanctionnés, mais il n’est pas spécialement inquiet. Il est juste écoeuré de voir que l’investissement qu’il met pour être le plus professionnel possible n’est pas suivi.

D’après vous, à quelle place finira le RCT en fin de saison?

D’après mes calculs, troisième. Peut-être mieux si l’un des deux premiers fait un faux pas. Je pense qu’en remportant nos six matchs à la maison et encore une victoire à l’extérieur, on devrait être dans les quatre premiers. Je suis confiant depuis la victoire à Perpignan, car l’équipe est montée en puissance et prend un volume qu’elle n’avait pas la saison passée. Et puis à force de nous fréquenter, les arbitres vont finir par nous aimer…

A propos du recrutement, pensez-vous faire signer Julien Tomas?

Il va sûrement rester à Montpellier. C’est un bon choix, car il n’a pas cédé aux sirènes des prédateurs (Son entraîneur Fabien Galthié avait parlé de «prédateurs» pour évoquer l’intérêt du RCT pour certains de ses joueurs dans une interview accordée à Midi Olympique, Ndlr). Il continuera de travailler avec un très bon entraîneur, qui de plus, est d’une humilité absolue. Il a toutes les qualités, il parle bien en levant les yeux au ciel pour se donner l’image d’un mec qui vit dans une autre dimension. Il paraît que lorsqu’il se rase le matin il pense à l’équipe de France et depuis qu’il est à Montpellier, il n’a jamais été aussi bien rasé… Au-delà de ça, c’est un bon entraîneur car il a fait d’une équipe qui jouait le maintien, une équipe qui joue le titre.

Ces mêmes Montpelliérains prétendent que le pré-contrat signé par Gorgodze avec le RCT peut être cassé. Qu’en dites-vous?

Il y a des réglements dictés par la Ligue que l’on respecte et qui ne nous interdisent pas de faire signer des joueurs, mais seulement de ne pas communiquer avant le 1er février. Il y a également le droit français que l’on entend faire respecter. On a des avocats qu’il faut tenir en laisse, sinon ils mordent… Les droits du club seront respectés. Pour l’instant, on ne tient pas à communiquer sur d’éventuels accords.

Membre de la commission de renégociation des droits télé, Mourad Boudjellal évoque ce sujet épineux. Où en sont les négociations?

On attend les réponses aux appels d’offre. Grâce à un magnifique développement des clubs qui ont beaucoup investi, le produit qu’a acheté Canal + il y a quelques années ne correspond plus du tout au prix de l’époque (l’enveloppe annuelle est aujourd’hui de 31 millions d’euros, Ndlr). Ce qui était encore un championnat de province est devenu le meilleur championnat du monde. Canal + doit le reconnaître et honorer notre travail en donnant le maximum.

Le championnat vaut-il autour de 100 millions d’euros?

Je ne sais pas combien il vaut, mais on ne peut passer pas sa vie à vendre moins cher que ce que cela nous coûte, sinon on ira dans le mur. Auquel cas, il vaut mieux ne pas vendre. Peu de sports ont évolué comme le rugby. On ne peut pas dire que l’on n’a pas été un vendeur qui n’a pas respecté son acquéreur.

Ne pas vendre signifierait que le rugby ne soit plus visible par le grand public. Ce n’est pas pensable…

On verra bien. Parfois, la meilleure concurrence est le manque. Le rugby remplit les stades et son avantage est qu’aujourd’hui, il ne dépend pas des droits télé. Je pense aussi que l’absence de 4 à 5000 abonnés peut peser dans l’économie de Canal +. Quand un match de football se termine, les téléspectateurs zappent pour regarder Le Juste Prix sur TF1 alors que le public du rugby regarde Le Grand Journal. Le rugby n’attire pas la ménagère de cinquante ans, mais des gens qui consomment, qui ont le pouvoir. Canal + aura du mal à se priver de son public générationnel. Et puis, le niveau du championnat de France de football est d’une très grande faiblesse. Même les Guignols de Canal + s’en moquent. Je ne veux pas que le football soit surpayé pour sous-payer le rugby. C’est comme si tu payais 2000 euros un joueur qui jouait aussi bien qu’un joueur payé 20 000 euros.

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