Rudi Wulf commençait à sérieusement se languir. Mais sa patience a fini par être récompensée. Samedi soir, le Néo-Zélandais sera à pied d’oeuvre d’entrée de jeu face à Bayonne dans un stade Mayol en fusion. Sa dernière apparition dans la peau d’un titulaire à Toulon remonte déjà à plus d’un mois. C’était pour la réception du Lou d’Olivier Azam, le 22 décembre. Mais ce match-là ne lui a pas laissé un souvenir impérissable.

Pourtant, Wulf avait livré une bonne prestation. Alors pourquoi a-t-il préféré l’effacer de sa mémoire ? Sûrement d’abord par superstition. Un mauvais coup reçu au niveau de son genou face aux Lyonnais l’avait contraint, le week-end suivant, à déclarer forfait à Paris. Mais sûrement aussi en raison de la gueulante d’anthologie poussée par Bernard Laporte à la mi-temps. « Bernard était devenu rouge écarlate, rit-il à l’évocation de ce souvenir. Il nous hurlait tellement dessus qu’à un moment donné, je me suis demandé s’il respirait encore. Il était tellement énervé qu’il s’était effacé de lui-même et avait ensuite laissé le soin à Chris de nous parler. Les entraîneurs kiwis peuvent parfois crier mais jamais dans les mêmes proportions. À côté de Bernard, ce sont des enfants de choeur. »

Wulf a beau avoir joué pour les All Blacks, ses quatre sélections pèsent peu dans une équipe comptant chez ses joueurs parmi les plus beaux palmarès du rugby mondial. La polyvalence de Wulf a fini par lui jouer des tours. Capable aussi bien de jouer à l’arrière, à l’aile comme au centre, il est devenu, avec le temps, le remplaçant idéal au RCT. Pas de quoi pourtant le décourager. Il entend profiter au maximum de chaque minute qui lui est offerte sur le terrain. Ce match face à Bayonne constitue la parfaite occasion de montrer toute sa rage et sa détermination à ses entraîneurs « Je sais très bien que Maxime Mermoz et Mathieu Bastareaud sont les choix numéro un au poste. Pour autant, je ne me laisse pas abattre. Chaque fois qu’on fait appel à moi, je veux être irréprochable et donner 200 % pour ce maillot toulonnais. Ce rendez-vous face à Bayonne est l’occasion rêvée de marquer les esprits. »

AMOUR ET FAMILLE

Sa réponse est tout sauf surprenante dans la mesure où Wulf sera contraint, en mai, de quitter le club varois. Un peu la mort dans l’âme. Car Wulf a vu son existence bouleversée par sa rencontre avec sa future fiancée Magali. Fervent amateur de cuisine japonaise, Wulf l’a rencontrée un soir de 2010 dans son établissement de sushi du Mourillon.

« Jamais je n’aurais imaginé tomber amoureux d’une Française, confesse-t- il. Comme je suis un très mauvais cuisinier et que j’adore les sushis, j’ai commencé à venir régulièrement déjeuner à son restaurant. Je suis tombé sous le charme de Magali. »

Un coup de foudre réciproque. De leur amour, sont nés deux fils : Leny, il y a deux ans, et Liam en décembre. Surtout, Wulf a (re) trouvé à Toulon cette chaleur familiale qui lui manquait terriblement. Magali a été son rock. En quatre ans, elle a fait de lui un véritable Toulonnais. Leur appartement possède une vue directe sur les plages du Mourillon. Son moment préféré ? Les promenades avec son fils en poussette le long de la plage et à admirer les reflets d’argent de la Méditerranée. Wulf a aussi tissé des liens très forts avec son cousin Chris Masoe, dont la mère est la cousine germaine de son père.

« Ils sont toujours fourrés ensemble, confirme Magali. Chris a véritablement pris Rudi sous son aile. Rudi a trouvé ici cet équilibre familial qu’il avait perdu. Chaque dimanche, il passe deux heures sur Skype à converser avec ses parents et ses soeurs. Il est triste car il ne peut pas revoir son fils Isaiah, né de sa première union en Nouvelle-Zélande. Son ancienne compagne lui interdit depuis neuf mois d’entrer en contact avec lui. Même s’il ne le montre pas, Rudi en souffre terriblement. »

Comme il souffre de ne pouvoir prolonger l’aventure au-delà de juin avec le RCT. Face une tête d’affiche comme Ma’a Nonu, Wulf n’a pas pesé bien lourd dans la balance. Sa gentillesse et sa discrétion l’ont également desservi au moment de renégocier un nouveau contrat avec Mourad Boudjellal, friand de personnages hauts en couleur. Après avoir déjà fait durer le suspense jusqu’au printemps la saison dernière, le RCT a réitéré en lui offrant un contrat difficilement acceptable au regard du contexte familial. Toulon lui a seulement proposé de prolonger d’un an avec une année optionnelle. « Rudi aurait voulu prolonger de trois ans pour terminer sa carrière à Toulon, détaille Magali. Malheureusement, le club ne l’a pas entendu ainsi. Rudi n’a pas d’autre choix que partir et poursuivre sa carrière ailleurs. »

Des clubs anglais se sont montrés intéressés. Mais également Castres, et Bayonne. Pour le moment, Wulf n’a pas encore tranché. Une chose est sûre, ce sera une nouvelle fois loin de sa famille. Propriétaire de deux restaurants, Magali ne peut pas se permettre d’abandonner ses affaires. Wulf, la déchirure.

Source: Midi Olympique