En quelques saisons seulement, Mourad Boudjellal est devenu un acteur incontournable dans le monde du rugby. Avec son franc-parler, il ne laisse personne indifférent. On l’aime ou on le déteste, mais les résultats qu’il obtient à la tête du RCT parlent pour lui.

Quand vous avez pris la présidence du RCT, pensiez-vous que vous alliez parcourir autant de chemin ?
Quand je m’engage dans quelque chose, ce n’est jamais à la légère. A l’époque, le RCT était en Pro D2 et n’intéressait pas grand monde. Je mesure aujourd’hui le chemin parcouru et je savais d’emblée qu’il serait long. La passion autour du club est telle que forcément cela donne envie d’aller encore plus loin ne serait-ce que pour satisfaire nos supporters.

Êtes-vous en adéquation avec l’image que vous renvoyez ?
Quand je parle dans les médias, je suis naturel. Je ne fais pas du cinéma, je ne joue pas à un jeu. Je n’ai jamais changé d’un iota ma personnalité. Je suis détesté par une partie du milieu du rugby et plutôt apprécié par une autre. Je suis à l’image du club. On ne laisse personne indifférent, on suscite des passions, c’est normal dans le Sud, on est comme ça.

Le RCT est un club mythique. En tant que président du RCT, ressentez-vous une certaine pression ?
Oui et elle est énorme. Vous savez, on est des « marchands de bonheur ». D’ailleurs, quand on réalise un gros match à l’extérieur je regrette de ne pas pouvoir le partager tout de suite avec les supporters. Il y a beaucoup d’attente voila pourquoi on essaye de construire au fil des ans une équipe de plus en plus compétitive capable de faire rêver les gens. C’est beau de parvenir à faire rêver les gens.

Quelle est votre opinion aujourd’hui sur le milieu du rugby ? 
Le milieu du rugby n’évolue pas aussi vite que le public et se réfugie derrière ses valeurs pour masquer ses lacunes. Personne ne veut toucher aux valeurs du rugby. On peut évoluer sans tomber dans des dérives. Le jour où je vois une banderole insultante au stade ou que j’entends des cris de singe lorsqu’un joueur de couleur touche le ballon, j’arrête moi-même la rencontre. Il ne faut pas tout confondre.

Que préconisez-vous ?
Je veux être un acteur du rugby car je crois sincèrement que le rugby, aujourd’hui, est sous-exploité et sous-évalué. J’estime que l’on peut faire beaucoup mieux et je pense savoir comment y arriver. Je pense savoir comment faire aussi pour que le passage devant la DNACG soit un peu moins difficile pour les clubs. A mon sens, il y a plein de zones et de secteurs économiques qui ne sont pas exploités. J’ai envie, justement de le faire non seulement pour mon club, mais aussi pour le rugby en général. Il faut bousculer certaines habitudes pour faire évoluer les choses.

De quoi êtes-vous le plus fier ?
A Toulon, on a créé une économie. On créé de l’audience à la télé, on créé de la billetterie pour les équipes qui nous reçoivent. Et le plus important c’est que nous sommes financièrement sains.

Que pensez-vous du retour au premier plan de Max Guazzini ?
C’est une bonne chose que Max s’exprime. Le rugby a besoin d’une personnalité nouvelle qui se projette vers l’avenir. Max a révolutionné le rugby en France, il peut encore révolution le rugby. C’est un battant qui saura respecter toutes les parties du rugby. C’est quelqu’un que j’apprécie beaucoup.

Vous avez suivi son exemple sur certains points, notamment des délocalisations des matches en en jouant certains au Vélodrome.
Oui car je trouve que c’est une excellente idée. Mayol c’est Mayol et il restera un stade mythique. Ce stade a une âme, mais ce qui m’a amené à délocaliser certains matches au Vélodrome, c’était qu’un plus grand nombre de personnes puisse voir les rencontres. Ce qui m’a fait rire aujourd’hui c’est qu’à l’époque où j’ai délocalisé certains matches au Vélodrome de Marseille, nombreux ont râlé alors qu’aujourd’hui ils sont les premiers à s’y rendre avec joie. On en revient à ce que je vous disais précédemment: il faut bousculer certaines habitudes pour faire évoluer les choses.

Y’a t-il un technicien avec qui vous auriez aimé travailler ?
Jacques Fouroux. Tout le monde m’en parle en me disant à quel point il était sympathique. Il détonnait aussi dans le milieu, il ne plaisait pas à tout le monde. J’aimais bien.

Entre la H-Cup et le Top 14, quelle compétition préférez-vous ?
Le Top 14. La H-Cup est culturellement moins implantée en France. Alors que le championnat, c’est plus de 100 ans d’histoire. Les gens rêvent tous de gagner le Brennus. Enfin, s’il y a une compétition que je regrette de ne pas avoir gagnée, c’est le Challenge Yves du Manoir. Ça restera mon grand regret car je ne pourrai jamais la gagner, ça c’est sûr, vu qu’il n’existe plus.

Un mot sur Pierre-Yves Revol qui quitte la présidence de la LNR ?
Il a plutôt bien géré la ligue, il a su naviguer entre l’ancienne école et la nouvelle. C’est vrai que nous avons eu des mots, mais c’était une façon comme une autre de faire connaissance.

Entretien réalisé par Rugby Magazine.