Critiqué pour son manque d’efficacité la saison dernière, l’ailier Toulonnais Bryan Habana semble avoir retrouvé son tranchant.

Lors d’un entretien accordé au Midi Olympique, le star du RCT revient sur les critiques de certains supporters à son égard. Interview à lire ci-dessous:

Malgré le doublé de la saison dernière, votre première saison à Toulon n’a pas franchement été très convaincante. Comment l’expliquez-vous ?

Cette première saison m’a laissé une certaine amertume. En raison de mes blessures, je n’ai pas pu trouver mon rythme. Il y a d’abord cette lésion aux ischio-jambiers qui m’a tenu éloigné des terrains pendant trois semaines. Lorsque je me pensais sorti d’affaire, j’ai eu la même blessure mais en pire, puisque le muscle s’est déchiré à partir de l’os. Résultat, je me suis retrouvé loin des terrains durant quatre mois. Pour un joueur, il n’y a pas pire que de se retrouver à l’infirmerie. Pendant que j’étais hors-service, j’ai vu mes concurrents David (Smith, N.D.L.R) et Drew (Mitchell, N.D.L.R) enchaîner les matchs et emmagasiner de la confiance. Dans ces moments-là, tu te sens vraiment inutile. J’étais arrivé avec tellement d’espoirs et d’attentes… Ces deux trophées ont constitué un véritable rayon de soleil. Cette deuxième saison se présente sous de meilleurs auspices car en cinq rencontres disputées, j’ai déjà inscrit 4 essais.

À vouloir absolument réussir, vous êtes-vous mis trop de pression ?

Je savais qu’en débarquant ici, il y aurait une grande attente autour de moi. Mais au cours de ma longue carrière, j’ai déjà connu des périodes de disette en sélection. Mon expérience avec les Springboks m’aide énormément d’un point de vue mental. Mais cela ne veut pas dire que je ne me mets plus la pression ! La pression la plus insupportable est toujours celle que l’on s’inflige.

En tant qu’ailier, votre mission première est de marquer des essais. Souffrez-vous quand vous restez muet offensivement ?

Vous savez, le jeu a énormément évolué ces dernières saisons. Pour un ailier, c’est bien sûr très important d’inscrire des essais, mais son rôle ne se cantonne pas seulement à être une machine à marquer. Quand je reste muet, je suis bien évidemment déçu. Mais je ne me rends pas malade non plus. J’essaie d’avoir un regard critique sur ma performance dans son ensemble. Cela me dérange davantage de ne pas avoir été à la hauteur sur les fondamentaux comme le jeu au pied et la couverture défensive avec mon arrière. Quand en plus de ne pas marquer, j’ai la sensation de ne pas évoluer à mon meilleur niveau, je peux me mettre la tête au fond du seau. Cela ne m’est encore jamais arrivé à Toulon. À chaque fois que j’ai enfilé le maillot rouge et noir, même sans marquer, j’ai toujours donné mon maximum.

Certains observateurs et supporters sont très critiques à votre égard en disant qu’ils avaient vu jusqu’à présent une pâle copie de Bryan Habana…

Chacun a le droit d’exprimer son opinion. Mais ces gens doivent savoir que je ne triche pas. Quand j’enfile un maillot, je me donne toujours à fond. Je n’ai peut-être pas marqué autant d’essais que certains pouvaient l’espérer avec le RCT. Mais depuis le démarrage de cette saison, j’ai été plus en réussite avec Toulon qu’avec les Springboks. Je sais pertinemment qu’entre mes blessures et mon engagement avec ma sélection nationale, je n’ai pas été aussi performant que je l’aurais voulu l’an passé. Mais j’ai toujours joué à 110 % de mes capacités chaque fois que j’ai revêtu le maillot rouge et noir. Par conséquent, je n’ai rien à prouver. Mais ces personnes doivent aussi prendre en considération le fait que parfois les matchs se jouent devant et les arrières ne voient pas trop le ballon.

Ces critiques vous ont-elles blessé ou, avec l’expérience, tout cela ne vous touche- t-il plus ?

Si tous ces gens qui parlent étaient des athlètes professionnels, j’aimerais bien voir comment ils s’en sortiraient à ma place. Les supporters toulonnais sont des passionnés et je ne peux pas leur en vouloir. Il faudrait juste qu’ils ne s’arrêtent pas aux statistiques d’essais marqués. Depuis le temps que je joue au plus niveau, je sais très bien que je ne peux pas plaire à tout le monde. J’ai la faiblesse de penser qu’en tant que membre d’une équipe qui a réalisé le doublé, j’ai moi aussi apporté ma pierre à l’édifice.

Depuis que vous êtes devenu père en juin dernier, vous semblez transformé…

Devenir père a remis certaines choses en perspective. J’ai eu la chance dans ma carrière de rugbyman de faire partie de grandes équipes, de grandes aventures, mais avoir un enfant, cela redéfinit vos priorités. Je suis un bon joueur de rugby, j’espère être un père encore meilleur. Cela ne m’a pas forcément rendu plus relax. Changer les couches de mon fils, Timothy, à trois heures du matin ce n’est quand même pas le top (rires) ! Mais ce grand événement a rendu ma vie plus belle. Ce bonheur familial a déteint sur mon rugby.

Il semblerait que votre faute en fin de match contre Leicester trotte toujours dans votre tête. Vous êtes notamment revenu dessus sur votre compte Twitter…

Ce qui me met en rage, c’est d’avoir mal interprété le commandement de l’arbitre. Comme il avait dit au 9 de Leicester « use it », « jouez », j’ai cru que je pouvais intervenir.

Avez-vous présenté vos excuses à vos partenaires à ce sujet ?

Si tout le monde s’excuse à chaque fois qu’il commet un impair… Il ne s’agit pas s’excuser, mais de reconnaître son erreur et de ne plus la répéter.

Source: Midi Olympique