La Fédération Française de Rugby effectue un signalement au procureur de la République
La Fédération Française de Rugby effectue un signalement au procureur de la République
Le mardi 4 novembre 2025 à 11:47 par David Demri
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La Fédération française de rugby (FFR) a signalé à la justice plusieurs zones d’ombre autour du chantier du Centre d’innovation des rugbys, surnommé le « mini Marcoussis ». Ce projet, imaginé sous la présidence de Bernard Laporte, fait désormais l’objet d’un signalement au procureur de la République par la direction actuelle, conformément à l’article 40 du Code pénal.
Un projet né sous Laporte, devenu un fardeau financier
L’idée initiale de Bernard Laporte, alors président de la FFR, était ambitieuse : vendre Marcoussis pour financer la création de deux nouveaux sites.
- Un centre sportif flambant neuf à La Londe-les-Maures (Var), doté de quatre terrains et d’un hôtel quatre étoiles.
- Et un centre administratif et d’entraînement à Pantin, en Seine-Saint-Denis, sur le site du stade Raoul-Montbrand.
Mais le rêve s’est vite transformé en casse-tête. L’armée, propriétaire des terrains varois, a refusé la vente, tandis que le site de Marcoussis restait invendable à cause de son classement en zone d’équipements sportifs.
Malgré tout, la FFR a signé une convention d’occupation du domaine public pour 70 ans avec le département de Seine-Saint-Denis afin de lancer le projet de Pantin. Coût initial : 12 millions d’euros. Quelques mois plus tard, l’estimation passait à 23 millions, puis 33 millions aujourd’hui. Un gouffre pour une fédération déjà plombée par des déficits chroniques.
Une attribution de marché controversée
L’un des principaux points d’interrogation concerne l’attribution du chantier au groupe NGE, géant du BTP.
Selon les informations de L’Équipe et du Canard enchaîné, la société aurait été choisie tardivement, alors que deux autres groupes – Sogeprom et Nexity – négociaient avec la FFR depuis plus de six mois. Trois jours seulement après sa désignation, NGE aurait pourtant été capable de fournir une réponse complète à l’appel à projet, un délai jugé extrêmement court.
Bernard Laporte, contacté, affirme qu’il « prend acte du signalement » et espère que l’enquête permettra de lever « les supposés doutes ».
Un manque de transparence pointé par un rapport d’expertise
Un rapport économique interne évoque une opacité importante dans la gestion du dossier. Les experts auraient relevé :
- des écarts de prix injustifiés entre le coût du programme sportif et celui du programme commercial (bureaux, logements, restaurant) ;
- l’absence de documents obligatoires détaillant la décomposition des prix ;
- et un manque d’implication de l’assistant à maîtrise d’ouvrage chargé du suivi du projet.
Face à ces irrégularités, la FFR aurait mis en demeure NGE de transmettre les pièces manquantes.
Des décisions prises sans validation des clubs
Le projet, suivi de près par Alexandre Martinez, trésorier historique de l’ère Laporte puis président intérimaire en 2023, n’a jamais été soumis au vote d’une assemblée générale malgré les promesses initiales.
Seule une autorisation d’emprunt de 15 millions d’euros avait été votée. Cet emprunt n’a jamais été contracté, et la nouvelle direction de Florian Grill a dû renégocier un financement à des conditions bien moins avantageuses.
Le départ en 2020 du partenaire associatif Sport dans la ville, qui devait occuper une partie des locaux, a par ailleurs fait exploser le coût global en ajoutant 3 000 m² de bureaux vacants.
Un héritage embarrassant pour la nouvelle direction
Prévue pour être inaugurée en février prochain, la structure de Pantin n’a toujours pas trouvé de locataires stables pour ses espaces administratifs. L’actuel exécutif fédéral estime déjà un déficit d’exploitation de 2,8 millions d’euros par an pour ce projet.
Ce dossier, mêlant ambition politique, opacité financière et risques immobiliers, s’ajoute aux nombreuses zones d’ombre laissées par l’ère Laporte.
La justice doit désormais déterminer si, au-delà des maladresses de gestion, il y a eu irrégularités ou favoritisme dans l’attribution du marché Montbrand.
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