Le choc de Nicolas Depoortere : « J’étais au sol, complètement sonné, j’ai eu peur, j’ai senti du sang dans la bouche »

Le choc de Nicolas Depoortere : « J’étais au sol, complètement sonné, j’ai eu peur, j’ai senti du sang dans la bouche »

Le jeudi 18 décembre 2025 à 23:35 par David Demri

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Le jeune trois-quarts centre Bordelais, Nicolas Depoortere s’est longuement confié via L’équipe.

Au cours de cet entretien, il avoue traverser une très bonne période de sa carrière. Extrait:

Juste avant mes premières sélections en équipe de France lors du Tournoi des Six Nations 2024, j’étais aussi très en forme. Je me souviens d’un match contre le Racing où j’avais traversé le terrain mais aussi d’un essai inscrit à Toulon. Ce sont un peu les mêmes sensations que je retrouve aujourd’hui. Je me sens vraiment en confiance. Et quand c’est le cas, j’arrive à prendre du plaisir et exploiter mon rugby. Je ne suis pas du genre à me poser de questions. Et encore moins cette année.

Sérieusement blessé au visage au mois d’octobre 2024, Nicolas Depoortere avoue avoir traversé un moment très compliqué après cette blessure. Extrait:

Après ma fracture du plancher orbital (contre Perpignan en octobre 2024), inconsciemment j’ai eu un blocage qui m’empêchait de me libérer à fond sur le terrain. Je suis allé voir une psychologue et je me suis aussi entouré d’un prépa mental pour essayer de le déverrouiller. Et petit à petit, j’ai repris confiance.

Il dévoile sa méthode pour finalement rebondir. Extrait:

Déjà, on a essayé de revoir cette scène pour l’accepter et l’oublier. Sur le coup, je ne pensais pas que ça m’avait autant marqué. J’en ai pris conscience ensuite. J’en ai parlé avec la psychologue. En fait, c’est presque l’équivalent d’un accident de voiture d’où l’on sort avec des séquelles et parfois la peur de reprendre le volant. Je n’avais absolument pas peur de revenir sur un terrain mais quelque chose était bloqué dans mon cerveau. Mon corps se mettait sa propre limite pour ne plus revivre un truc comme ça.

Il raconte ce moment très compliqué et avoue avoir eu très peur au moment de cette blessure. Extrait:

J’étais au sol, complètement sonné. J’ai eu peur, d’abord pour mes dents et j’ai senti du sang dans la bouche. Le docteur est vite arrivé, il les a regardées et m’a dit que ce n’était rien. Puis la douleur au niveau du visage a pris le dessus. Une énorme douleur. À ce moment-là, ça lance, ça pique, ça brûle. C’est affreux. Je me suis dit :  »Là, c’est tout pété ». (Il se marre) J’ai pris un autobus. Ils m’ont évacué sur un brancard après avoir examiné les cervicales puis je suis allé passer des examens à l’hôpital derrière le stade. Le visage a commencé à gonfler, gonfler… Le premier soir, ça allait. Le lendemain, je n’étais plus le même. Le côté droit avait triplé. J’étais méconnaissable. C’était abusé ! (Il se marre) Jusqu’à l’opération, la douleur était affreuse.

Cette blessure a été un véritable calvaire à vivre pendant plusieurs semaines. Extrait:

À la suite à l’accident, c’était un calvaire pour le sommeil durant deux ou trois semaines. Je n’arrivais pas à dormir. J’avais trop mal. Je prenais tous les médicaments possibles puis mon visage a commencé à dégonfler. Au départ, j’avais mal à la tête dès qu’il y avait de la lumière à cause de la commotion cérébrale. Et durant quelques mois, le temps que les nerfs se remettent, je n’avais plus de sensation au niveau de mes dents. J’avais peur de les perdre mais tout va bien aujourd’hui (sourire). La blessure fait partie des risques du métier mais celle-là n’est pas commune quand même.

Il confirme que ses parents ont eu très peur pour lui. Extrait:

Oui, il avait dit que c’était un attentat. Mes parents étaient en tribunes et ils ont surtout eu peur. Voir leur fils au sol comme ça, c’est assez flippant. À l’hôpital, j’avais demandé à mon frère de me remontrer l’action car je ne me souvenais pas du choc. Et là je me suis dit :  »Ah oui, il m’a bien défoncé ! » Mais je n’en veux pas à Naqalevu (qui a écopé de six semaines de suspension pour ce mauvais geste). Ça reste un fait de jeu même s’il ne se baisse pas complètement. Maintenant, c’est du passé et je m’en fous totalement.

Pour repartir de l’avant, il a contacté un préparateur mental qui l’a beaucoup aidé. Extrait:

Quelques semaines après ma blessure, je sentais que je n’étais pas à mon meilleur niveau et j’ai pris contact avec une personne qui travaillait avec le club à Lormont où mon frère jouait (il évolue désormais à Langon). Depuis, j’ai continué le travail avec ce prépa mental. Ça m’aide beaucoup dans la préparation des matches, que ce soit avec Bordeaux ou l’équipe de France. Dans les autres sports, tous les grands sportifs comme Teddy Riner sont accompagnés. J’ai lu des livres, je me suis renseigné. On n’est pas des robots. Ça m’a fait du bien car on n’a pas forcément la facilité de développer nos capacités extra-rugby. Ça permet de débloquer quelques trucs mentalement.

On bosse uniquement sur l’aspect sportif chez moi, dans un endroit sain que je connais, lors de deux à trois séances par mois. On visualise des situations précises. Au lieu de douter après une action ratée, je dois accepter ce que j’ai fait pour passer à autre chose et basculer sur une action positive. Lorsque ça va moins bien, on essaie de mettre en place un protocole pour affronter les doutes et les erreurs, avec toujours l’objectif de prendre du plaisir.

Il précise cependant ne jamais avoir douté de pouvoir récupérer l’intégralité de ses capacités physiques. Extrait:

Non, je n’ai pas douté car je savais que je pouvais de nouveau atteindre un autre niveau mais j’étais frustré. Ça m’agaçait franchement car pendant quelques mois je n’ai pas pu exprimer mon potentiel à 100 %. J’ai beaucoup échangé avec le staff puis ça s’est décanté petit à petit, surtout à partir de la fin de saison dernière. J’étais plus naturel. D’abord lors de la victoire en demi-finales de Coupe des champions contre Toulouse (35-18, le 4 mai), une étape importante à la fois collective et individuelle, puis le titre bien sûr (28-20 contre Northampton, le 24 mai) et enfin la tournée avec le quinze de France en Nouvelle-Zélande, une super expérience qui m’a fait beaucoup de bien malgré les défaites. Après les vacances de cet été, je me sentais vraiment bien lorsque j’ai retrouvé le groupe au stage à Faro (Portugal).

Désormais rétabli, il expliquer vouloir profiter pleinement au quotidien. Extrait:

Oui, je profite à fond et je prends tout ce qu’il y a à prendre car on ne sait pas de quoi sera fait demain. J’ai toujours le  »smile ». Il n’y a pas une fois où je me dis :  »Putain, fais chier, je vais devoir m’entraîner ». Je kiffe tout le temps. Tous les matins quand le réveil sonne, je suis content de venir ici, de voir la tête des potes, du staff. Comme je dis souvent, je ne me prends pas le chou et je ne me le prendrai jamais.

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