Il ne peut plus plier la jambe : Alex Arrate raconte l’enfer qui a stoppé sa carrière à 28 ans

Il ne peut plus plier la jambe : Alex Arrate raconte l’enfer qui a stoppé sa carrière à 28 ans

Le jeudi 25 décembre 2025 à 19:39 par David Demri

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À 28 ans, Alex Arrate, ancien joueur du Stade Français et du RC Vannes, a choisi ce que beaucoup redoutent : mettre fin à sa carrière, rattrapé par un genou qui n’a jamais vraiment guéri.

« Alex Arrate contraint de mettre un terme à sa carrière », annonçait le RCV le 11 décembre. Un retrait immédiat, vécu avec dignité, même lorsqu’un hommage chargé d’émotion lui a été rendu à la Rabine quelques heures plus tard. « Un moment hors du temps vécu avec émotion », glisse-t-il.

Derrière cette décision se cache une douleur devenue trop lourde pour être ignorée. Pour la comprendre, il faut revenir au 18 janvier 2018. Arrate a 20 ans, porte le maillot de Biarritz, et voit sa saison basculer sur une entorse grave : ligament croisé rompu, ligament interne touché, ménisque abîmé.

Une opération lourde, classique dans le rugby, mais dont il ne récupérera jamais totalement. « Je n’ai pas eu la chance de récupérer comme beaucoup d’autres… Malchance ou pas, je n’en sais rien. Mais j’ai quand même réussi à tenir jusque-là », raconte-t-il dans les colonnes de L’équipe, sans amertume.

Le jeune homme n’a pas hésité à décrire sa douleur atroce. Extrait:

« Je n’ai plus de cartilage, donc mes os frottent l’un contre l’autre. Je n’arrive plus à plier le genou ou à le tendre complètement. Quand je suis en période de crise, je ne peux même pas monter ou descendre des escaliers. Dès que je marche vingt minutes, j’en ai marre. Le soir au moment de me coucher, la sensation de la couette qui glisse sur mon genou est atroce.

Mais bizarrement, pendant les matches, avec les anti-inflammatoires et l’adrénaline, je ne sentais rien. Mais sur une semaine de sept jours, ça allait un jour et les six autres, c’était un calvaire. Ça devenait de plus en plus pesant. Chaque matin, je me demandais si j’allais pouvoir m’entraîner et assumer mes responsabilités de sportif professionnel.

Et même si le staff est prêt à te ménager pour te protéger, au fond de toi, tu te dis que tu n’as pas le droit, que tu triches. J’étais tiraillé. Et comme nous sommes bercés par la compétition, la gagne, tu tires sur la corde. Pour ne rien arranger, à cause de ça, mon humeur change. Je deviens désagréable. Ce n’est pas facile à gérer. »

Pendant près de dix ans, il a joué, souffert, avancé. « Ça se voit que j’ai une jambe que je ne peux pas trop plier, que j’ai une technique de course aléatoire. Mais le mental prenait le dessus. » Jusqu’à ce que la balance bascule : les infiltrations répétées — « quatre cinq fois par an » —, les anti-douleurs quotidiens, et ces crises où monter un escalier devenait une épreuve. « Sur une semaine, ça allait un jour, les six autres c’était un calvaire. »

Un reportage vu par hasard, ou par nécessité, a fini de sceller la décision. « J’ai vu des anciens athlètes parler des séquelles. Je me suis retrouvé dans tous leurs témoignages ». Puis vient la phrase qui résonne comme une libération : « Au moment du reportage, j’étais blessé. J’ai pris conscience que la santé prime avant tout. »

Arrêt forcé, mais choix assumé. Arrate refuse d’afficher la moindre rancœur. « Je ne suis pas triste que ça s’arrête, mais content de l’avoir vécu. » Il évoque cependant une réalité qu’il ne peut masquer : « Je suis handicapé dans ma vie de tous les jours. Quand je marche, je boite… Quand je suis assis trop longtemps, il faut que je me lève, sinon la douleur est insupportable. »

Deux spécialistes consultés. Une option : une prothèse en titane. « 28 ans, c’est un peu jeune pour poser une prothèse… »

Alors il temporise, préserve son futur, s’offre du temps. L’avenir, lui, prend déjà forme. Retour à Paris, fin d’études en Master 2 à Neoma Business School, recherche d’un stage, puis d’un emploi. « Place à ma seconde vie ! »

Le rugby, lui, restera là, jamais loin. « Je regarderai les copains, j’irai au stade partager une bière. J’arrête six mois plus tôt que prévu, mais ça ne change rien. » Avant de livrer un message qui sonne juste, porté par l’expérience crue du terrain : « Il ne faut jamais se sentir forcé de jouer. La santé des joueurs est primordiale. »
« Je ne pars pas fâché avec le rugby. »

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