Antoine Dupont va effectuer son grand retour à la compétition ce dimanche soir contre le Racing 92.

Un moment fort pour le Top 14 qui va donc retrouver l’un des meilleurs joueurs du monde.

La coach mentale et thérapeute Asmaa Niang s’est longuement confié via L’équipe sur le retour de l’international Français à la compétition.

Elle explique notamment qu’Antoine Dupont devra parler à son genou pour cette reprise. Extrait:

Dire « n’y pense pas » serait du déni. Plutôt que d’occulter, je lui recommanderais de se connecter intensément à cette partie de lui-même, de parler à son genou : « Tu es fort », « tu es solide. » C’est une réalité car il a bossé dur pour ça. Notre corps nous écoute, des travaux de la Harvard Medical School ont démontré l’impact positif des pep talks, des dialogues intérieurs valorisants. Une rééducation ne doit pas se contenter de remettre le corps en état mais aussi de permettre de se reconnecter avec une partie de soi.

Deux blessures dans la même zone, ça crée un ancrage de fragilité car par deux fois votre corps vous a lâché. « Est-ce que je vais me reblesser ? » est une pensée évidente. Je travaille avec des d’athlètes qui se sont pété deux, trois fois, quatre fois le genou… Ces blessures sont provoquées par un choc ou un déséquilibre fonctionnel mais ont souvent une dimension de somatisation. Le genou, c’est lié à la relation du moi et des autres, du « je » et du « nous », le « genou » phonétiquement. Une bonne rééducation se doit de prendre en compte la mécanique autant que le pilote avec des exercices de conscientisation. Par exemple, face à un miroir, c’est important et souvent délaissé chez les hommes.

Si Antoine Dupont venait à appréhender son retour, alors elle lui donne quelques conseils. Extrait:

Je dirais à Antoine de se poser trois questions : « où es-tu ? », « quelle heure est-il ? », « qui tu es ? » : ici, maintenant, toi dans ce moment. Revenir à la réalité de l’instant, voilà tout ce qui doit compter. Tout le reste n’est que supputation et n’a pas d’importance.

Antoine va devoir assumer un « égoïsme positif », se focaliser sur sa performance individuelle. Cette approche personnelle l’aidera à se centrer et le rendra mieux disponible pour les autres. C’est l’hôtesse de l’air dans une cabine dépressurisée qui doit penser à son propre masque à oxygène si elle veut être utile aux passagers. Certaines techniques de respiration permettent d’opérer une régénération profonde en quelques secondes. Je m’en servais durant ma carrière de judokate ou dans des situations de tension comme lorsque j’enchaînais des gardes de 72 heures au sein des sapeurs-pompiers.

Elle explique concrètement en quoi cela consiste. Extrait:

Expirer. Poumons vidés. Rétention. Inspiration, se remplir d’oxygène en pleine conscience. Revenir en soi, sentir ce qui se passe. Trois cycles peuvent suffire pour envoyer à l’amygdale l’information que le corps est en sécurité. « Tu es gentil, je n’ai pas besoin de ton adrénaline. Ni de ton cortisol. Merci. Je suis bien. » Du pep talk, toujours. Ça se travaille autant qu’une série d’haltères.

Sur un terrain de rugby, à son boulot, Antoine Dupont va être confronté à la situation d’anonymes qui, en situation de stress, réactivent leur mémoire archaïque : j’ai perdu mon téléphone, mon collègue m’a mal parlé, je suis en retard. Tant d’agitations intérieures qui provoquent des apnées toxiques. Par une respiration adéquate, on parvient à abaisser son taux de cortisol et on a accès à des hormones magnifiques : la sérotonine, la dopamine. La pleine conscience de soi apporte lucidité et clarté, elle s’exerce. « Je relâche les épaules. » »Je détends ma mâchoire. » »Je ne suis pas en danger de mort. » Calme intérieur. « Je redeviens fluide. »