Meilleur marqueur d’essais avec Toulon la saison passée, mais systématiquement laissé de côté pour les grands matches, l’ailier néo-zélandais aspire à plus de reconnaissance à Castres.

À vingt ans, il rêvait de jouer pour les Blues et de devenir All Black. « Il a toutes les qualités pour y parvenir, disait alors le Néo-Zélandais Bryan Williams, son berger à Auckland : la vitesse, le sens de l’esquive, l’agressivité, l’explosivité. » David Smith a vingt-huit ans aujourd’hui. Et s’il a bien porté le maillot des Blues (2008), puis signé quelques prouesses du côté de Wellington, c’est dans une tunique sans fougère argentée, mais avec un brin de muguet, qu’il a fini par se pavaner. L’ailier d’origine samoane n’a laissé que d’excellents souvenirs à Toulon, où il a inscrit trente-huit essais en quatre-vingt-treize rencontres officielles. Le soir de son quadruplé face à Brive (le 7 mars dernier), le public de Mayol lui a clamé son amour et il comprend mal, encore aujourd’hui, comment il a été possible de laisser filer une telle pépite à Castres.

David Smith, c’est d’abord un bon mec, un chic type dont on apprécie autant le sourire que cette surprenante accélération sur les 10-15 premiers mètres. « David, dit Alex Tulou, à nouveau son partenaire dans le Tarn après l’avoir côtoyé aux Hurricanes avec Daniel Kirkpatrick, c’est un joueur d’instinct, vraiment très rapide, imprévisible dès que le ballon est dans ses mains. On dit qu’il n’est pas bon en défense, mais je ne pense pas qu’il soit moins fort que les autres ailiers en place dans le Top 14. À l’entraînement, il bosse même comme un fou, sur les plaquages, les grattages, je me demande même s’il ne veut pas venir me piquer ma place en troisième ligne. Mais avant d’être un grand joueur, c’est d’abord quelqu’un qui aime la vie. Pour lui, chaque jour est une fête. »

La fête à Toulon avait parfois un goût âcre. David Smith était un chouchou que l’on reléguait sur le banc dès les beaux jours de printemps, « dans les moments les plus importants de la saison », soupire-t-il. « Là-bas, il y a beaucoup d’internationaux, Bryan Habana, Drew Mitchell, et on leur faisait plus confiance. » Le meilleur marqueur d’essais de la saison passée (13) aurait aimé rester, prouver que l’on pouvait compter avec lui jusqu’au terme d’un exercice. « Mais on ne m’a proposé qu’une saison supplémentaire, regrette-t-il, et j’avais besoin d’un projet plus sécurisant. »

POURQUOI PAS À RIO AVEC LES BLEUS ?

Il a atterri à Castres, avec son « frère » Rudi Wulf. Avec, surtout, l’ambition de devenir un joueur sur lequel on peut vraiment compter… « Il recherchait ça, raconte Christophe Urios, il voulait être un homme important dans le système, dans le projet. À Toulon, il y a tellement de grands joueurs que ce n’est pas simple de pouvoir exister. Il est venu dans cette optique-là. Rudi aussi d’ailleurs. »

Exister dès cet après-midi face à… Toulon. « J’ai envie de gagner, non pas parce que c’est Toulon, mais parce que l’on se doit de gagner à domicile, assène-t-il. C’est un match particulier, bien sûr, mais Toulon, c’est fini, c’est derrière moi, mon équipe aujourd’hui, c’est Castres. »

La remarque plaît à Christophe Urios : « Affectivement, émotionnellement, c’est un match qui va compter et le danger serait de vouloir en faire trop. David et Rudi n’ont rien à prouver à Toulon. Il faut qu’ils donnent au groupe et au Castres Olympique, c’est ça qui est important. » Du bout des lèvres, David Smith concède qu’il se verrait quand même bien inscrire un essai face à ses anciens partenaires. « Marquer, ce serait bien, à condition que l’on remporte la victoire. C’est ça mon objectif : marquer des essais, aider Castres à gagner, à se qualifier dans le top 6. »

Les rêves de la fin d’adolescence sont remisés. Il n’a pas abandonné l’idée de défendre les couleurs d’une nation. Le rugby à 7 l’intéresse. Avec les Samoa ? La France ? « J’aimerais aller à Rio, confesse-t-il. Les JO, c’est un autre rêve. Je voulais jouer en équipe de France, ce n’est plus d’actualité, mais pourquoi pas jouer à 7 ? J’en ai parlé avec Christophe (Urios), on verra bien… » Son dernier rêve fleure la simplicité. Car David Smith n’aspire qu’à une vie tranquille, en famille, la famille du Castres Olympique. Il veut réussir ici. Marquer des essais. Être le numéro 1 à son poste. Du début à la fin. Il est champion de France, champion d’Europe. Il veut juste maintenant être champion de son club.

Source: lequipe.fr