Jonny Wilkinson et le rugby quantique ( Source Nouvel Observateur )

Jonny Wilkinson et le rugby quantique ( Source Nouvel Observateur )

12 janvier 2011 - 21:37

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Si vous n’êtes pas fan du drop de Jonny Wilkinson en 2003, qui fit gagner la coupe du Monde à l’Angleterre contre l’Australie, passez votre chemin. Encore que…

La soirée la plus hype – ou faudrait-il dire la « mêlée la plus connectée » ? – de Paris le 11 janvier, n’était ni aux Champs-Elysées, ni sur une péniche ou dans un bon vieux club. C’était boulevard Victor, dans la fort respectable Ecole nationale des sciences et techniques avancées (ENSTA Paritech). Sur le terrain, trois vedettes, chacune dans son genre. D’abord, eh oui, le demi d’ouverture en personne, tout en blondeur, biceps et accent british sur les imparfaits du subjonctif. En ailier intellectuel, un habitué des essais quantiques réussis, le physicien Etienne Klein (cf son dernier ouvrage « Discours sur l’origine de l’univers »). Et en arrière très expérimenté, le théoricien Jean Iliopoulos, bien connu des amateurs d’infiniment petit pour une touche fabuleuse (avec les très renommés Lee Glashow et Luciano Maiani) : la prédiction du quark charmé *!

Mais à quoi pouvaient-ils bien jouer tous trois sur la pelouse de l’auditorium ? Au « rugby quantique » pardi ! Une discussion sur le hasard, le réel et comment recréer le monde dans sa tête – que l’on imagine la trajectoire du ballon ovale après le coup de pied fatal (Wilkinson) ou qu’on construise la bonne équation pour identifier les briques élémentaires de la matière.

Parce que – et cela, tous les lecteurs de l’Equipe et du Midi Olympique réunis ne le savent pas forcément – l’ami Jonny est fasciné par la mécanique quantique !  D’ailleurs, n’a-t-il pas cité, dès le début du match verbal « The field », livre de Lynn McTaggart, qui évoque la découverte par des supercerveaux des vibrations connectant tout l’espace, un peu comme « la force » dans Star Wars ? Cette attraction étrange n’avait pas échappé à l’agrégée de lettres et éditrice Laurence Decréau, qui aime faire galoper l’équipe ENSTA sur le terrain de la réflexion et de l’écriture de la science**, et avait donc convié nos trois hommes à cette soule atypique.

Croyez-le ou non, l’échange de rugby « quantique » fut à l’aune du classique, un jeu de voyous joué par des gentlemen ! A preuve, l’emballement dans la salle (rires, applaudissements…) après des accélérations surprenantes du propos et des récupérations habiles. Jonny, tout comme Iliopoulos affirme « vivre avec son problème » (que ce soit la mise du ballon entre les poteaux « au milieu du milieu » ou l’identification de la particule élémentaire clé). Pour l’un comme pour l’autre, l’entraînement (le surentraînement, devrait-on dire) est donc un must. « Tu ne penses qu’à ça. Tu imagines toutes les configurations possibles. Et parfois, tu as de la chance. C’est quand cela devient une réalité que c’est spectaculaire ». Devinez donc qui prononça ces mots ? Le physicien ou le rugbyman ?

On aperçut dans les spectateurs le professeur de philosophie Jean-Michel Besnier (Sorbonne) qui devait se délecter devant ce vol déployé de concepts et affirmations : « J’avais besoin d’une autre perception du monde » (Wilkinson). « Ce que j’aime [dans une action de rugby], c’est quand l’ordre sort du chaos » (E. Klein). « L’énergie vient de l’esprit. On le sent sur le terrain. Ce qui est bien, c’est quand on est tous sur la même longueur d’onde » (Wilkinson). « Observe-t-on le réel ou notre interaction avec le réel » (Klein rappelant les interrogations du physicien/philosophe Bernard d’Espagnat dans son livre « A la recherche du réel » en 1979).

Après deux heures en ovalie et principe d’indétermination, on sentait le chat de Schrödinger rôder dans la salle, et une forme d’intelligence collective se manifester. Comme l’a redit Jonny : « Le secret, c’est qu’on doit travailler et rester ouvert à toutes les possibilités. Il faut sentir la solution ».

Allez, on retourne au vestiaire. Le vestiaire, c’est important. C’est là, avant la fin du match de 2003 que toute la séquence ayant conduit au fameux drop-goal avait été pensée, a explicité Jonny. C’était en elle que « résidait toute la beauté » a-t-il philosophé. Encore fallait-il qu’advienne la spectaculaire réalité, le drop réussi du bout du pied.

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  1. Guillaume 12 janvier 2011 at 23h

    J'y étais et c'était super bien, j'ai eu mon ballon signé et j'ai même pu tchacher avec sa sa majesté :). Dès que je lui ai dit que j'étais né à Toulon, il m'a tapé la discute! Ce mec est génial ! Et il compte bien nous faire gagner quelque chose!

  2. Georges 13 janvier 2011 at 00h

    Avons beaucoup apprécié cet article du Nouvel Obs…savions notre KING SUN adepte de science quantique à laquelle il y mêle intimément tout partie de cette philosophie des sciences !! ce dont nous retenons de notre billant ouvreur , outre sa somptueuse individualité , est qu'il a su se mettre au service du COLLECTIF..et..pour rester dans cette tonalité d'univers quantique..notre souhait de remémorer cette pensée de Heinz Pagels.." ce que l'individu perçoit comme une liberté n'est rien de plus qu'une nécessité du point de vue..COLLECTIF "..ce physicien Américain..adpete aussi de l'univers quantique..a pondu un ouvrage remarquable..le code cosmique..et une théorie du chaos..comme Etienne Klein cité dans cet article..et dont notre JONNY doit connaitre !!! allez TOULON et vive..JONNY 🙂

  3. viking83 13 janvier 2011 at 00h

    Vous avez quittez "la banane" pour le "flore" ! Castor dans les travées de Mayol ! Super et surprenant article. J'ai de quoi potasser en attendant dimanche.

    Comme disais Boris Vian " Les articles de fond ne remonte jamais à la surface"

  4. Georges 13 janvier 2011 at 10h

    Au café de Flore…il y avait déjà tant de folles..à notre époque !!!!!…et avons aussi beaucoup goûté dans cet article…l'évocation de ..l'imparfait " accent british " sur l'imparfait du subjonctif de notre ami JONNY…nous rappelle quelques joûtes grammaticales avec un autre ami sur quelque autre chaine…le..que serait donc la vie sans l'imparfait du subjonctif..de Vialatte !!! allez TOULON.. "" on n'existe pas sans faire ! """ Simone de Beauvoir…pour une morale de l'ambiguité !! 🙂

  5. bfi 13 janvier 2011 at 11h

    Une toulonnaise (StMandrier plus exactement) est aussi dans le domaine : Virginie Langlois

    Je vous conseille l'un de ces 2 petits romans, qui intégre insensiblement ces notions (Les Sabliers du Temps, La Grande Eclaire).

    L'action du second se déroule d'ailleurs dans la région (Bandol, Sanary…).

    Elle fait par ailleurs une mini conférence au café Philo à Toulon le 21 janvier prochain.

    Biz à elle !

  6. Joël 13 janvier 2011 at 12h

    Certains adeptes de la physique quantique pensent très sérieusement que notre univers se reproduit dans l'espace en au moins deux à trois exemplaires ce qui augmenterait d'autant notre propre reproduction… Un Gorgoze c'est bien, trois c'est mieux, Galthié pourrait alors consentir à en laisser partir au moins un…

  7. xavier 13 janvier 2011 at 12h

    jy était aussi et jpe dire que cétait vraiment sympa.

  8. Georges 13 janvier 2011 at 12h

    " Self reproducing inflationary Univers "…auto reproduction de notre univers actuel Ercétien…avec quelques JONNY ,JOES et..GEORGE…de plus en plus adepte de cette philosophie quantique…mon Cher Prof.. !! allez TOULON 🙂

  9. Dédé 13 janvier 2011 at 13h

    St Jonny, le quantique des quantiques, amen les points !

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