La compagne de Josaia Raisuqe raconte le terrible accident : « Il est décédé sur le coup, d’un trauma crânien »
La compagne de Josaia Raisuqe raconte le terrible accident : « Il est décédé sur le coup, d’un trauma crânien »
Le mercredi 25 juin 2025 à 23:00 par David Demri
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Le destin s’est figé un matin ordinaire dans le Tarn. Ce jour-là, Ilona, aide-soignante, a vu sa vie basculer. En face d’elle, un homme en costume sombre, Matthias Rolland, le directeur général du Castres Olympique, porteur d’une annonce qui allait tout changer.
Son compagnon, Josaia Raisuqe, joueur du Castres Olympique, venait de perdre la vie dans un accident ferroviaire.
Commence alors, pour la jeune femme, un parcours de deuil hors du commun, entre douleur indicible et hommage vibrant, jusqu’à la terre natale de celui qu’elle aimait.
L’instant du choc, l’incompréhensible
Josaia a été fauché par un train. Sur les lieux de l’accident, elle découvre un corps intact.
Celle-ci s’est confiée via Midi Olympique :
« Arrivée sur les rails, je me suis approchée de la voiture, j’ai soulevé le drap et derrière, Joe était intact. Je pensais qu’il dormait et lui ai dit : « réveille-toi, mon amour ». Je lui ai même mis des petites tapes sur les joues, pour qu’il ouvre les yeux. Il n’y avait pas de sang, juste une bosse au niveau de la tête : rien de plus qu’un hématome propre à un match de rugby, en somme. »
Et malgré la tragédie, pas de colère en elle :
« J’étais anéantie mais je n’ai pas ressenti de colère. Le train l’a percuté et il est décédé sur le coup, d’un trauma crânien. J’imagine d’ailleurs très bien ce qu’il s’est passé : face aux barrières, il s’est dit qu’il serait le plus rapide, qu’il allait encore gagner… Il a écouté la « petite voix », celle qu’il écoutait aussi parfois, sur le terrain, quand il sortait du cadre et prenait des cartons. »
Elle précise que, juste avant le drame, Josaia Raisuqe a croisé le regard de son coéquipier Antoine Tichit. Extrait:
« La dernière vision qu’il a eue sur terre, c’est donc celle de son ami Antoine Tichit, au volant de la voiture qui lui faisait face. Avant de traverser, Joe a souri à Antoine et n’a pas eu conscience de ce qu’il s’est produit ensuite. Il est donc parti en paix, sans souffrir. »
Une histoire hors normes
Leur rencontre avait eu lieu à Castres, un soir de fête. Ilona se souvient de son rire, de sa tendresse maladroite, de leur quotidien empli de complicité.
« Joe me faisait tellement rire, vous savez… Il avait beau faire 2 mètres sur 2 mètres, il avait peur de tout. »
Elle évoque aussi avec le sourire leurs différences culturelles.
« Les Fidjiens vivent sans meubles. […] Quand je suis entrée chez lui la première fois, j’ai dit : « mais où est ton canapé, Joe ? » » Ce choc des habitudes ne les a pas éloignés. Au contraire, il a scellé un lien fort, lumineux.
Ramener Joe à la maison
À peine quelques jours après le drame, Ilona prend une décision radicale : accompagner le corps de Josaia jusqu’à son village natal, à Lutu, aux Fidji. Elle ne veut pas le laisser partir seul. Là-bas, un pays entier l’attend. Des rues remplies d’anonymes émus. Une église bondée, un ministre présent à l’aéroport, et des enfants recevant du chocolat, comme à chaque retour du rugbyman au pays. « Ils l’aimaient parce que Joe était bon. »
Le moment le plus fort ? Ce chant, repris en chœur par les joueurs fidjiens du Sevens, la même chanson que Joe entonnait à Libourne. « La dernière fois que j’avais entendu cette musique, dit-elle, Joe la chantait avec eux. »
Deuil fidjien, rituels sacrés
Là-bas, la mort ne se tait pas. Elle s’exprime à haute voix. On crie, on pleure, on chante. Ilona découvre une autre manière de vivre la perte : « Le rapport à la mort est très différent. […] Les cent premières nuits suivant le décès, on n’a par exemple pas le droit de se couper les cheveux, pas le droit de faire le kava, de boire de l’alcool ou de fumer. »
Autour du cercueil, des hommes se transmettent une dent de baleine, symbole d’un droit à la parole solennelle. Une tradition millénaire, chargée de respect et d’émotion.
Repartir, sans vraiment quitter
Aux Fidji, le deuil s’officialise après un mois. Mais pour Ilona, rien ne s’efface si vite. « La maman de Joe pleure tous les matins. […] Parfois, ils me demandent si je vais bientôt chercher un autre mari à Lutu. […] Vous imaginez bien que je ne le vis pas du tout ainsi. »
Et pourtant, apaisée, elle s’apprête à revenir en France avec un regard neuf sur la vie, sur l’amour, sur la mort. « Je n’oublierai jamais l’amour que m’ont donné les Fidjiens et en moi, Joe ne mourra jamais : il est ma vie, là-haut. »
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Tellement triste tout ça. Courage à elle et RIP Joe
Ce qui est vraiment triste, c’est qu’il y ait encore et toujours des gens qui franchissent des passages a niveau fermés au 21ieme siècle…
c’est beau ce qu’elle dit, très émouvant
Terrible et beau