
Le point sur la campagne présidentielle de Bernard Laporte
Le point sur la campagne présidentielle de Bernard Laporte
Le mercredi 6 avril 2016 à 9:38 par David Demri
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L’actuel manager de Toulon quitte aléatoirement la Rade, comme les croisés avant lui, pour mener sa propre croisade. Son but ? Devenir président de la Fédération française de rugby afin de réformer le rugby hexagonal qui va selon lui dans la mauvaise direction.
Pour sa croisade, Bernard Laporte n’a pas pris la mer mais les routes et les chemins de France afin de prêcher la bonne parole. Depuis plus de sept mois, le manager du RCT s’est lancé à l’assaut du bastion de la FFR, cible de son courroux. Un combat intense et rude qui a débuté par un meeting à Gaillac, son club formateur. Depuis, Bernard Laporte a enchainé vingt-six réunions à travers l’Hexagone afin de présenter son projet de réforme du rugby français. « On fait le tour de France depuis le 1er septembre 2015, confie l’ancien sélectionneur des Bleus. Je viens à la rencontre des présidents de clubs pour leur expliquer les raisons de mon engagement dans cette candidature à la présidence de la FFR ».
L’élection, prévue pour décembre 2016, pourrait marquer l’avenir du rugby français. Depuis que l’ancien entraîneur du Stade Bordelais et du Stade Français a annoncé sa candidature, plusieurs personnalités du rugby français se sont aussi déclarées. Pierre Camou (l’actuel président), Pierre Salviac et maintenant Lucien Simon briguent la plus haute responsabilité du rugby français. Mais dans une campagne où il est omniprésent, de par ses réunions et ses déclarations récentes sur les performances du XV de France, Bernard Laporte n’a que faire de ses concurrents. « Je ne regarde pas les autres, lâche le manager toulonnais. J’ai besoin de montrer aux présidents de club que je viens les voir. Ces réunions m’ont permis d’analyser leurs problèmes et j’essaye de trouver des solutions. C’est intéressant de venir à leur rencontre. Si les autres ne le font pas, c’est leur problème ». Depuis 1996, il n’y a jamais eu deux listes concurrentes pour l’élection du président de la FFR. Mais vingt ans plus tard, quatre candidats se présenteront. Une véritable révolution démocratique pour le rugby français.
LA DÉMOCRATIE POUR TOUS !
Mais pour que cette élection et cette révolution soient un succès, l’ancien temps devra être abolit. Les dernières élections (fédérale et assemblées générales) ne se sont tenues qu’avec à peine 50 % des clubs. La faute au système de représentation. Les présidents de clubs absents de ces réunions fédérales donnent procurations à d’autres présidents du même comité dans la limite de 10% des clubs du comité concerné. Un système qui dans certains cas peut prêter à certaines pressions dans le but d’obtenir les mandats nécessaires à certaines décisions. Bernard Laporte veut changer ce mode de scrutin et mettre une urne dans chaque comité régional. « C’est ce qu’on appelle le vote décentralisé, argumente le candidat toulonnais. Je voudrais aller encore plus loin puisque j’aimerais que chaque président puisse voter depuis son club. Nous serions alors véritablement en démocratie ».
Pour le manager du RCT, il faut même étendre ce droit. « S’il y a de grandes idées pour le rugby français, pourquoi ne pas faire des référendums ou tout le monde pourrait voter en trois jours, propose-il. Cela me semble judicieux. Encore une fois, c’est dans les statuts. Le pouvoir politique appartient aux présidents de clubs. On leur a tellement supprimé depuis longtemps qu’il faut qu’il le retrouve ». Pourtant, la réforme des statuts de la FFR à Hyères en 2013 prévoit la possibilité d’organiser l’assemblée générale de la fédération de façon décentralisée dans chaque comité territorial par la voie d’un système de vote décentralisé. Soit pour l’élection directe, par tous les clubs, du comité directeur et du président de la FFR, soit pour permettre la consultation directe des clubs par le président de la fédération. Elle prévoit aussi la possibilité du vote électronique. Mais ces modifications ne sont pas encore mises en place.
« LE RUGBY FRANÇAIS VA DANS LA MAUVAISE DIRECTION »
De la politique, Bernard Laporte en a fait puisqu’il a été secrétaire d’Etat chargé des Sports pendant presque deux années dans le gouvernement de François Fillon. Une expérience qui lui sert aujourd’hui dans la course à l’élection présidentielle de la FFR. L’entraineur de Toulon s’est, depuis le début de sa campagne, opposé au projet de Grand Stade voulu par l’actuelle Fédération. Fin février, le candidat Laporte a reçu un coup de pouce de la Cour des Comptes. Cette dernière a émis un avis défavorable à sa construction soulignant qu’il y avait deux risques pour l’Etat : l’un budgétaire et l’autre patrimonial. « Je ne suis pas là pour dire si j’ai raison ou si j’ai tort, argumente-il. J’essaye d’être logique. L’idée d’un stade appartenant à la Fédération française de rugby est une bonne idée, judicieuse même. Mais encore faut-il en avoir les moyens. Quand ce n’est pas le cas, il faut dire non. C’est ce que la Cour des Comptes a dit. Attention à ne pas mettre en danger l’avenir de votre Fédération, c’est ce que je dis depuis le début ».
Autre raison de son courroux, les mauvais résultats du XV de France. Cinquièmes du Tournoi des VI Nations, les joueurs de Guy Novès n’ont pas eu les résultats attendus malgré un projet repris de zéro et de belles intentions de jeu. L’ancien sélectionneur des Bleus estime néanmoins que « le rugby français va dans la mauvaise direction. Aujourd’hui, comme on ne fait plus de formation, c’est quoi le résultat ? C’est qu’au bout du tuyau, il n’y a plus de joueurs français qui sortent et on prend des étrangers, constate-il. On a choisi la facilité, et je n’en veux pas. Je veux mettre beaucoup de moyens dans la formation pour faire en sorte que d’ici dix à quinze ans, à la sortie du tuyau, il y ait un maximum de joueurs français ». Pourtant, lorsque le manager toulonnais était à la tête du XV de France, il n’a pas hésité à faire jouer des « étrangers » comme Pieter de Villiers ou Tony Marsh. Une contradiction qu’assume Bernard Laporte. « Lorsque l’on a lancé ces joueurs, c’est que nous n’en n’avions pas d’autres à leur place, se défend-il. Ce sont des personnes qui sont restées dix-douze ans en France. Ce n’est pas comme aujourd’hui où on dit : tiens celui-là, il a joué trois ans, on le fait jouer de suite. On en fait même une politique sportive, c’est cela qui me dérange. Mais pour continuer à valoriser les clubs, à leur dire de former, former et vous serez récompensés, il faut donner l’exemple. L’équipe de France doit s’appuyer sur des joueurs qui doivent avoir la nationalité française ».
LE SOUTIEN DE SON PRÉSIDENT
Pourtant pas avare en déclaration sur tous les sujets qui touchent au rugby français et mondial, Mourad Boudjellal n’a pas été très causant sur cette élection présidentielle de la FFR. Le président toulonnais a quand même livré ses impressions sur la candidature de son manager. « Je le soutiens bien que je ne sois pas d’accord sur tous les points, annonce l’homme fort du RCT. Pour moi, la mise sous contrat fédéral des joueurs du XV de France est compliquée à mettre en place. Il faut aussi supprimer des matchs car certains sont inutiles. Il faut réformer le Top 14 ». Mais ces points de désaccords n’empêchent pas le président toulonnais de soutenir Bernard Laporte. « Je le soutiens car c’est quelqu’un de compétent, d’honnête ce qui est sa qualité principale. Cela ne veut pas dire que les autres ne le sont pas » sourit-il. Pour Mourad Boudjellal, le candidat Laporte a suffisamment d’expérience pour être président de la FFR. « La compétence, cela n’apparait pas du jour au lendemain, lance le président du RCT. Il a eu des résultats en tant que sélectionneur du XV de France mais aussi en club comme vous le savez. J’ai ce sentiment que Bernard sait s’entourer. Le rugby français a besoin de sang neuf. A mon avis, c’est très prétentieux de se représenter quand son bilan n’est pas bon ».
Le propriétaire du triple champion d’Europe n’a jamais caché ses racines et ses origines. Mourad Boudjellal à ses propres idées concernant la composition de l’équipe de France et la polémique récurrente sur la présence d’étrangers au sein de l’équipe nationale. « Le XV de France doit ressembler à la société française, dit-il. Comme Bernard, je ne peux pas concevoir qu’un joueur joue trois ans en France et soit de suite sélectionnable avec les Bleus. Le droit du sol et le droit du sang sont primordiaux à mes yeux ». Le président du RCT soutient aussi son manager à propos de la formation des jeunes joueurs français. Selon lui, « la formation doit être active et pas passive. C’est ce que j’ai dit à la Cellule technique du XV de France quand j’ai été auditionné. L’instauration des JIFF a tué la formation française ». Mourad Boudjellal estime que les jeunes français ne peuvent pas s’exprimer pour plusieurs raisons dont le coût de formation et la valeur actuelle des internationaux tricolores. « Les joueurs hexagonaux coûtent très cher et du coup les clubs préfèrent acheter des étrangers aussi bons et moins onéreux, constate-il. En supprimant les JIFF, on limitera l’inflation des joueurs français ce qui permettra aux clubs de faire jouer leurs jeunes mais aussi de continuer à former ». Des idées que ne manquera pas de partager le président du RCT avec son manager. La campagne de Bernard Laporte est loin d’être finie. Le plus dur reste à venir.
Source: rugby365.fr
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