Le début de la Coupe des champions envoie un signal dérangeant pour le rugby français. Présenté comme le championnat le plus relevé de la planète et ultra-dominant sur la scène européenne ces cinq dernières années, le Top 14 peine clairement à imposer sa loi depuis le lancement de cette nouvelle édition.

En France, l’idée revient souvent : le Top 14 serait le championnat le plus dense, le plus exigeant, le plus difficile au monde. Mais ces certitudes résistent-elles vraiment à l’épreuve européenne ? Après deux journées de Champions Cup, le constat est brutal. Les clubs français ne dominent pas, loin de là, et ont même concédé plusieurs revers face à des équipes britanniques pourtant loin d’être injouables.

Le week-end écoulé a laissé des traces. Quatre défaites françaises, certaines très lourdes, ont marqué les esprits. Bayonne et Pau ont vécu de véritables naufrages chez les Harlequins (68-14) et à Bristol (61-12). Des scores sans appel face à des équipes de Premiership qui ne figurent pourtant pas parmi les cadors de leur championnat.

À Londres, les Harlequins, qui n’avaient remporté que deux matches depuis le début de la saison, ont infligé 60 points à l’Aviron. Une claque difficile à justifier, qui interroge autant les supporters que les diffuseurs, confrontés à des rencontres déséquilibrées, parfois sans réel suspense.

Une compétition reléguée au second plan

Pour plusieurs clubs français, la priorité est clairement ailleurs. Le Top 14 reste l’obsession numéro un, et la Coupe des champions apparaît parfois comme une contrainte plus qu’un objectif. Effectifs remaniés, cadres au repos, jeunes propulsés dans le grand bain : Clermont, Bayonne et Pau ont fait des choix assumés. Résultat, ces trois équipes affichent zéro point après deux journées, tout comme Leicester.

Les discours se ressemblent. Effectif diminué, infirmerie pleine, calendrier infernal… Les excuses sont connues et parfois légitimes. Grégory Patat, le manager de Bayonne, expliquait déjà après la défaite contre les Stormers qu’il ne pouvait pas aligner son équipe type. Pourtant, l’argument des absents ne suffit pas toujours.

Samedi, à Clermont-Ferrand, Sale a donné une véritable leçon de rugby à l’ASM. Et ce, malgré l’absence de 13 joueurs majeurs, dont plusieurs internationaux anglais habitués au XV de la Rose. Une démonstration qui rappelle qu’il est possible de gagner en Coupe d’Europe même avec un groupe amoindri.

Cette saison encore, malgré un début de Top 14 irrégulier, le CO n’a pas fait l’impasse. Pour les Tarnais, performer en Champions Cup fait partie de la préparation globale. Une vision qui contraste avec celle de certains clubs lourdement battus ces dernières semaines.

La question se pose désormais ouvertement : ces lourdes défaites aident-elles réellement à rebondir en championnat ? Clermont, corrigé par les Saracens puis Sale, est-il mieux armé avant son déplacement à Perpignan ? Rien n’est moins sûr.

Reste que les faits sont là. Les équipes anglaises semblent aujourd’hui mieux préparées pour la Coupe des champions. Bath, Northampton ou les Saracens affichent un rythme élevé, une intensité constante et une fraîcheur physique qui posent de vrais problèmes aux formations du Top 14.

Le jeu y est plus rapide, le ballon vit davantage, le temps de jeu effectif est plus long. Un contexte qui tranche avec les habitudes françaises, où l’occupation, la gestion et la dépossession restent souvent privilégiées. À Gloucester, Castres s’est d’ailleurs trompé d’approche en tentant de jouer sans le ballon, avant de rectifier le tir par la suite.

Arbitrage différent, rucks plus disputés, rythme plus soutenu : les explications s’accumulent, sans totalement convaincre. Après deux journées, le Top 14 est clairement à la peine sur la scène européenne. Reste à savoir si le mois de janvier permettra de rééquilibrer la tendance… ou de confirmer un malaise plus profond.