Les protège-dents connectés pas vraiment confortables pour les joueurs
Les protège-dents connectés pas vraiment confortables pour les joueurs
Le jeudi 18 décembre 2025 à 11:11 par David Demri
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Un an après leur arrivée dans le rugby professionnel, les protège-dents connectés ont discrètement changé la façon dont les commotions sont détectées. Loin des promesses futuristes ou des effets d’annonce, leur utilité se mesure aujourd’hui sur des faits concrets, mais aussi sur des limites clairement identifiées.
Midi Olympique consacre un reportage sur ces protège-dents connectés.
Le point de départ est simple : le rugby reste un sport où toutes les commotions ne sont pas visibles. Certaines échappent à l’arbitre, à la vidéo, au staff médical… et parfois même au joueur lui-même. « Le but est de réussir à sortir des joueurs commotionnés qui n’ont pas été détectés par la vidéo, par l’arbitre, par le médecin de match ou par les autres joueurs », résume Bernard Dusfour, président de la commission médicale de la LNR. Sur ce critère précis, le premier bilan est clair. « Est-ce que cela a été efficace sur la saison passée ? La réponse est oui ».
Quand la technologie voit ce que l’œil ne voit pas
Sur la dernière saison, neuf joueurs ont quitté le terrain uniquement après une alerte déclenchée par leur protège-dents. « Le protège-dents a sonné, le joueur est sorti et la commotion était avérée », précise Bernard Dusfour. Particularité majeure : dans ces situations, rien ne laissait présager une commotion à l’image. « À aucun moment nous avons vu des signes de commotion ».
Ces cas représentent environ 10 % des commotions détectées. Un chiffre qui peut paraître modeste, mais qui change concrètement la prise en charge. « Cela confirme que c’est un outil supplémentaire pour lutter contre l’un des plus grands dangers du rugby », souligne Olivier Petit, responsable des affaires médicales et du programme santé joueurs à la LNR. Loin de remplacer l’humain, l’outil agit comme un filet de sécurité supplémentaire.
Un outil encore en phase d’ajustement
Ce premier succès ne masque pas les axes de progrès. Le système est encore en rodage. « Les réglages en cours sur cette saison sont notamment effectués pour améliorer la sensibilité du protège-dents », explique Bernard Dusfour. À terme, l’idée n’est plus d’avoir un seuil unique pour tous. « Cela pourrait évoluer avec des adaptations en fonction des joueurs, de leur poste, de leur style de jeu et de leur gabarit », précise Olivier Petit.
Mais l’enjeu ne se limite pas à la technologie. L’acceptation par les joueurs reste centrale. Des efforts ont été faits. « On a réussi à imposer que les protège-dents soient mieux personnalisés », affirme Olivier Petit. Malgré cela, le confort pose encore question. « Au niveau du confort, avec la puce sur le côté, ce n’est pas optimal », explique Louis Jalabert, préparateur physique de l’USM. « C’est plus gros mais que d’un côté, c’est localisé et c’est souvent ce qui provoque la gêne ». Pour lui, la solution est claire : « L’idéal serait d’affiner un peu la puce ».
Quelques joueurs bénéficient d’exemptions pour raisons médicales, mais « c’est à la marge », rappelle Bernard Dusfour. Dans l’ensemble, l’outil est aujourd’hui « mieux accepté », même s’il reste des réticences individuelles.
Un enjeu qui dépasse le match du week-end
L’intérêt du protège-dents connecté ne se limite pas à sortir un joueur après un choc violent. À long terme, il pourrait transformer la prévention. « On veut savoir si le fait de subir beaucoup d’accélérations, rotatoires ou linéaires, vont entraîner des conséquences sur l’état cérébral du joueur », explique Bernard Dusfour. Et surtout déterminer « à partir de combien d’accélérations cela peut entraîner des conséquences physiques ».
Pour Olivier Petit, l’enjeu est inédit : « Cela nous permet d’accumuler des données précises sur la charge d’impact qu’on ne pouvait pas mesurer avant ». Y compris à l’entraînement, avec une perspective nouvelle : « Être dans la prévention en se disant qu’il faut mettre certains joueurs au repos avant d’atteindre la commotion ». Pour l’instant, prudence scientifique : « Les données sont encore à l’étude et les scientifiques n’ont pas d’avis tranchés ».
Le protège-dents connecté n’a donc pas révolutionné le rugby en une saison. Mais il a ouvert une porte. Pour savoir jusqu’où il peut aller, il faudra du temps, des données… et encore au moins deux saisons d’observation.
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