Six jours seulement après avoir inscrit son nom au panthéon européen du rugby, l’Union Bordeaux-Bègles ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Avec le trophée de la Champions Cup fraîchement soulevé, les Girondins visent désormais un objectif aussi mythique que redouté : le doublé.

Un rêve devenu ambition

Longtemps jugé inaccessible, le doublé Champions Cup – Top 14 a fini par tomber, au fil du temps, entre les mains des clubs les plus armés et les mieux structurés. Toulon avait ouvert la voie en 2014, Toulouse lui a emboîté le pas, deux fois, sous l’ère Ugo Mola (2021, 2024). Ce qui semblait jadis un exploit réservé à une autre époque, à une autre densité de jeu, est devenu un sommet atteignable.

À Bordeaux, ce sommet est désormais une cible affichée. Dès les premières lueurs du sacre européen, Laurent Marti, président emblématique de l’UBB, n’a pas tardé à verbaliser ce que tous sentaient : « gagner devient une addiction ». Et cette équipe, façonnée dans la douleur de ses échecs passés, semble plus affamée que jamais.

Une équipe taillée pour durer

Si le rêve bordelais prend aujourd’hui une tournure aussi crédible, c’est aussi grâce à une évolution structurelle du rugby professionnel. Là où les effectifs d’autrefois tournaient autour de 35 joueurs, ceux des grandes écuries du XXIe siècle en alignent aujourd’hui 50, capables d’évoluer à haut niveau toute la saison. Une profondeur indispensable pour traverser les trois campagnes imbriquées que sont le Top 14, la Champions Cup et les fenêtres internationales.

Le calendrier, également, joue en faveur des ambitieux. Les cadences infernales d’antan ont été allégées, offrant désormais aux clubs un sas de décompression entre les finales européennes et les phases décisives du championnat domestique. Assez pour respirer, digérer l’exploit et repartir au combat.

L’UBB, nouvelle cible du rugby français

Mais le succès a un revers. En détrônant le Stade Toulousain, l’UBB n’a pas seulement conquis l’Europe : elle a hérité d’un nouveau statut, celui de bête à abattre. « Avec leur sacre, les Bordelais ont arraché du dos des Hauts-Garonnais l’étiquette “équipe à (a)battre” ». Désormais dans le viseur de tout le Top 14, les Girondins devront apprendre à vivre avec la pression de leur nouveau costume.

À quelques encablures des phases finales, Bordeaux est idéalement placé pour s’offrir une qualification directe en demi-finale — et donc un repos bienvenu. Mais pour aller au bout, il faudra plus que de la fraîcheur : il faudra de la constance, du caractère, et des épaules solides pour porter cette ambition inédite.

Une saison déjà historique

Quelles que soient les suites de cette aventure, l’UBB a d’ores et déjà marqué les esprits. Son premier titre majeur est acquis, mais l’histoire, elle, ne fait peut-être que commencer. À l’image de ses leaders, Bordeaux a changé de dimension. Et dans le rugby moderne, ceux qui gagnent savent que le plus dur n’est pas d’y arriver… mais d’y rester.

Dans cette nouvelle ère, l’Union Bordeaux-Bègles n’a plus rien d’un outsider. Elle est devenue une puissance installée, à qui le rêve du doublé n’apparaît plus comme une utopie, mais comme une étape.