– Que vous inspire cette première partie du Tournoi ?
D’abord une domination anglaise, car ils sont premiers et les seuls à avoir gagné tous leurs matchs, au Pays de Galles, et à domicile de superbe manière contre l’Italie, et solidement face à la France. Donc logiquement, ils sont les seuls en course pour le Grand Chelem, et je pense qu’ils peuvent le faire. Maintenant, si l’on regarde bien les rencontres, mis à part Angleterre–Italie (NDLR : 59-13), tous les matchs sont serrés, rien n’est joué, et nous ne pouvons jamais dire qui va gagner avant le coup de sifflet final. C’est très excitant, et cela reste fidèle à l’histoire du Tournoi, avec son histoire, ses rivalités, le côté épicé de la compétition. Petit, j’étais déjà accroc et je le suis toujours.

– Quelles sont les mauvaises surprises ?
L’Ecosse est pour moi la grosse déception de ce Tournoi. Ils restaient pourtant sur une bonne Tournée d’automne avec notamment un succès face à l’Afrique du Sud (NDLR : 21-17), et semblaient confirmer avec une belle prestation contre la France en ouverture malgré la défaite. Mais le match contre le Pays de Galles a tout effacé !
La deuxième, mais dans une moindre mesure est l’Irlande. On sent que c’est la fin d’un cycle, et c’est à l’image de leurs provinces comme le Leinster ou le Munster. Ils ont, je pense, conservé le même effectif trop longtemps. Attention, ce sont toujours de grands joueurs, mais ils n’ont plus le même allant, et je crois qu’ils devraient plus intégrer les jeunes, histoire d’apporter un second souffle.

– Italie, Galles et France sont donc de bonnes surprises selon vous ?
Oui. L’Italie d’abord. Malgré la dernière place, et une valise en Angleterre, les Italiens ont fait de bons matchs à domicile, et ils ont fait trembler les Irlandais et les Gallois. Ils montent en puissance depuis 2001, et je pense qu’ils finiront par faire tomber un gros chez eux un de ces jours. J’espère pour les Bleus que ce ne sera pas les Français cette année !
Pour le Pays de Galles c’est différent. Avant le Tournoi, ils restaient sur une longue série de défaites, mais ils ont relevé la tête avec deux victoires. Ils sont toujours dangereux, car très vifs et très joueurs. Après, le problème réside dans le numéro 10. Avec James Hook et Stephen Jones, ils possèdent deux grands joueurs, mais aux profils différents. Jones est bon défensivement et offensivement, mais sans faire d’éclats. En revanche, avec Hook, ils possèdent un véritable animateur de jeu qui est capable de poser des problèmes à toutes les défenses. Pour moi, il correspond plus au style de jeu gallois, et devrait donc être fixé à l’ouverture.
Les Français aussi sont une sorte de bonne surprise. Car après une Tournée d’Automne compliquée, on pouvait craindre qu’il y ait des séquelles. Malgré la défaite à Twickenham, ils ont, je trouve, repris confiance en eux. Le gros problème français tient plus de la régularité. Ils doivent s’améliorer à ce niveau et être capables d’enchainer les matchs, au moins sept de suite, lors de la Coupe du Monde. Ça tient du côté latin, qui est beaucoup dans l’émotion.

– Et vos compatriotes anglais ?
Pour moi, l’Angleterre est la grosse surprise de ce Tournoi. Il y a eu beaucoup de critiques sur le XV de la Rose, sur son jeu, son management, ses joueurs… mais les Anglais sont têtus, ils sont restés dans la même voie, et ça leur sourit. Ils ont eu la bonne idée d’apporter beaucoup de jeunesse et de fraîcheur, à l’image de Foden ou Youngs, mais il y en d’autres, et ça fait beaucoup de bien. De toute manière, ils n’avaient pas le choix, car après la Coupe du Monde 2003, ils ont eu beaucoup de retraites, et il fallait changer la donne. Ils ont un groupe qui bouge peu, où les jeunes sont parfaitement intégrés au système et ça fonctionne. Et je pense que ça ne peut que s’améliorer jusqu’au Mondial.

– Vous attendez le « Grand Slam » anglais je suppose ?
Non, non, il y a d’abord l’Ecosse. Pour être Anglais, je sais qu’en Angleterre, on se projette très peu, on prend le match qui vient et on voit ensuite. Bon, logiquement, l’Angleterre devrait gagner ce week-end. Ils auront ensuite tout le temps de penser au voyage en Irlande.

– Que représente un Tournoi des VI Nations pré Coupe du Monde ? Est-ce une préparation en tant que tel, ou est-ce encore trop lointain ?
Les entraîneurs et les joueurs sont à fond sur le Tournoi, même s’ils ont une petite pensée pour la Coupe du Monde, mais c’est trop loin. Avant d’y penser, il faut que tout le monde adhère au projet de jeu, déjà sur le Tournoi, pour que chacun s’y retrouve et y soit efficace. Mais il est évident que cela peut donner des pistes pour septembre  prochain.

– De ce que vous avez vu pour le moment, pensez-vous que les Nations du Nord seront capables de rivaliser avec celles du Sud en Nouvelle-Zélande ?
Les équipes du sud sont favorites. Lors de la tournée d’automne ils ont pratiquement tout gagné. Lorsqu’on regarde le Super 15, on voit que c’est dense et que ça va très vite. Mais sur un match, on sait par exemple que les Français sont capables de battre n’importe qui, n’importe où. Mais comme je le disais, seront-ils capable d’enchainer ? Sinon, les Anglais aborderont la compétition, comme toujours, sûrs de leur fait, et de ce qu’ils montrent. Je pense sincèrement qu’ils seront prêts. Mais pour moi, je le redis, les Nations du sud restent favorites.