Toujours dépité, Shaun Edwards explique comment il a pris Jalibert sous son aile dès la blessure de Ntamack !

Toujours dépité, Shaun Edwards explique comment il a pris Jalibert sous son aile dès la blessure de Ntamack !

Le jeudi 30 novembre 2023 à 10:27 par David Demri

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Le spécialiste de la défense du XV de France, Shaun Edwards s’est confié via L’équipe.

Ce-dernier explique ne pas s’être encore totalement remis de l’élimination des Bleus en Coupe du monde.

Cette élimination a été très difficile à accepter pour lui. Extrait:

La vérité, c’est que je suis toujours en train de me remettre… J’aurais aimé être rapidement de retour à l’entraînement. C’est mon caractère. Je suis comme un boxeur qui a été au tapis, qui se relève et veut repartir au combat. J’ai hâte de préparer le match face à l’Irlande (le 2 février à Marseille, en ouverture du prochain Six Nations). Après cette défaite face aux Boks, j’ai ressenti un sentiment de vide absolu. On venait de sortir des matches de poules par une performance magnifique face à l’Italie (60-7 à Lyon, le 6 octobre). Notre défense avait été solide. Faut se souvenir qu’on ne les avait battus que de cinq points (24-29, le 5 février à Rome) lors du dernier Tournoi.

Il se dit amer et en colère. Extrait:

Vide, mais aussi amer et en colère. Abattu, tellement désolé pour les gars, pour moi, pour tous les Français. Je ne veux pas être ce mec qui critique l’arbitre. Je sais à quel point c’est un job difficile. Tout se passe à une vitesse dingue, c’est quasi impossible de tout voir. Et puis, le rugby ce n’est pas ça : tu perds, mais tu serres la main de l’adversaire. La défaite, ça s’encaisse comme une droite au menton. Après coup, quand même, j’ai eu besoin de clarifications sur les décisions d’arbitrage. Jérôme Garcès (consultant arbitrage des Bleus) m’a expliqué les choses en détail. Par exemple sur les mains au sol du gratteur Kwagga Smith qu’on a tous vues sur l’écran dans le stade…

L’arbitre (le Néo-Zélandais Ben O’Keeffe) n’avait pas l’opportunité d’avoir accès à la vidéo. Son recours est réservé aux situations de fautes, comme un coude au visage, par exemple, ou alors à la suite d’un essai. Je ne veux pas garder en moi que de l’amertume. On aurait pu mieux jouer sous les chandelles. Les ailiers sud-africains (Cheslin Kolbe et Kurt-Lee Arendse) ont été super bons pour se nourrir de chaque ballon perdu. C’est terrible car notre attaque avait été incroyable en première période face à une énorme défense adverse. Quand je regardais les Springboks, certains cherchaient de l’air. Tout ce qu’on avait travaillé pour les contrer dans les mauls ou dans leurs enchaînements à trois temps de jeu a bien fonctionné. On a bien su répondre dans la dimension physique. On les a plaqués avec férocité. Et chaque essai qu’on a inscrit, c’était du pur rugby.

Dans la foulée, il tente d’expliquer la défaite des Bleus contre les Boks. Extrait:

C’est important de connaître ses faiblesses, de savoir là où l’adversaire va porter les coups. Si le gars que tu boxes a un bon jab, il te faut pouvoir l’esquiver. Face aux Australiens (victoire 41-17, le 27 août), on avait pris deux essais sur des chandelles. Après ça, on a bossé dur sur ces cas de figure. Face aux Boks, malheureusement, on a eu deux incidents sur des ballons aériens mal captés. C’est d’autant plus surprenant qu’un de nos joueurs impliqués dans l’action est très bon dans les réceptions. Peut-être qu’il a été ébloui par une lumière du stade ou je ne sais quoi. Bref, on s’est ratés sur deux chandelles. Ça nous coûte quatorze points.

Le secteur aérien, c’est devenu capital. La palette des coups de pied s’est énormément développée. Avant, l’affrontement était latéral ou au sol. Aujourd’hui, on est en plein dans la troisième dimension avec ce combat au-dessus des têtes. À nous de bosser encore plus sur cet aspect. On est déterminés.

Il explique ensuite comment il travaille la discipline avec les Bleus. Extrait:

D’abord, il faut leur montrer des clips de leurs erreurs et leur demander : « Y a-t-il moyen de faire autrement ? » Sur certaines situations de rucks, la solution est parfois de ne pas contester. Dans d’autres cas, il faut ferrailler, mais ce n’est pas toujours possible quand un gars est au sol. Là, j’ai mis au point des « drills » (exercices) reproduisant chaque situation à l’entraînement (il se lève pour nous montrer l’exercice). Après le match face à l’Italie dans le Tournoi, on a bossé ça sans relâche.

C’est surtout sur la hauteur des plaquages. J’ai dû trouver un truc facile à capter pour les joueurs dans l’instantanéité du combat. J’ai interdit les mouvements circulaires des bras, comme les crochets en boxe. Pour une raison simple, selon la hauteur à laquelle l’adversaire est positionné, cela peut devenir un plaquage à la gorge. J’ai préparé nos joueurs à attaquer le ballon au corps, avec un mouvement de bas en haut. Comme des uppercuts. Les coudes serrés, avec les hanches pour avoir de la puissance à l’impact. Un truc que les caméras ne voient pas.

Il est ensuite revenu sur la blessure contractée par Romain Ntamack. Un gros coup dur. Extrait:

Un coup dur à titre personnel aussi. C’est un joueur que j’aime bien, un ouvreur très robuste en défense. Un peu comme le Sud-Africain Handré Pollard. Mais Matthieu (Jalibert) a aussi très bien joué.

Il a rapidement pris Matthieu Jalibert sous son aile suite à la blessure de Romain Ntamack. Extrait:

En lui donnant plus de confiance. On s’est fait des sessions d’entraînement supplémentaires, des ateliers de plaquages. Toujours sur bouclier car je me fais un point d’honneur à ne jamais blesser mes joueurs lors d’un entraînement. S’entraîner à plaquer, ça peut être dangereux si le gars vous retombe sur les chevilles. J’ai connu ça avec Leigh Halfpenny au pays de Galles. L’idée majeure que j’ai tenu à transmettre à Matthieu était qu’il devait être à l’initiative de la collision. Ne pas la subir.

C’est comme en boxe quand on casse la distance pour éviter que le coup adverse prenne de la vitesse qui s’additionne en force et en puissance. Face à Etzebeth (essai de la 67e), ça a été compliqué pour Matthieu. Mais franchement, quand on a les Sud-Africains lancés à trois mètres de sa ligne, ce n’est jamais simple. Sur l’ensemble, Matthieu a bien répondu présent.

Il lui arrive de se réveiller en pleine nuit pour préparer des exercices. Extrait:

Ça m’arrive. En principe, je vois les choses aux entraînements et je les note sur un bout de papier. Un mélange de mots et de croquis. J’ai un carnet aussi. Parfois, la nuit, les pensées arrivent par vagues. Mieux vaut les noter pour ne pas les perdre. Cette hyperactivité mentale m’arrive surtout pendant les camps d’entraînement. Et je ne suis pas le seul.

Pour conclure, Shaun Edwards parle de son prochain objectif avec l’équipe de France. Extrait:

On a une nouvelle équipe qui se forme avec l’arrivée de Patrick Arlettaz (entraîneur de l’attaque) et Laurent Sempéré (co-entraîneur des avants). Ils sont du coin. Il n’y a pas longtemps, je les ai invités à venir voir du Top 14 à la maison autour d’un barbecue. Ils n’étaient pas dispos, on se fera ça bientôt. La défense, l’attaque, c’est un travail en commun, tellement interdépendant. Karim Ghezal (ancien co-entraîneur des avants) a été ultra-précieux pour améliorer notre défense sur maul. Dans l’idéal, la défense, c’est notre premier tremplin pour l’attaque. Avec l’encadrement de l’équipe de France, on se retrouve tous ensemble début décembre. Puis après le réveillon du 31 décembre, on aura un stage de quatre ou cinq jours à Naples, avec aussi les moins de 20 ans. »

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