Il n’a eu besoin que d’un entraînement collectif pour montrer de quoi il est capable. Recruté plus tôt que prévu en provenance du Benetton, Tomás Albornoz a vécu ses premiers pas en Top 14 lors du succès de Toulon contre Perpignan (31–16). À peine entré à la 56e minute, le public de Mayol n’a pas tardé à faire connaissance avec son nouveau maître à jouer.

Depuis plusieurs jours déjà, son arrivée animait les discussions sur le port et aux abords du stade. Vidéos virales, séquences lumineuses avec les Pumas, 50 mètres au drop pour offrir la victoire à Trévise en Challenge Cup : l’ouvreur argentin débarquait avec l’étiquette d’un joueur capable de casser les défenses les mieux structurées. Et malgré un seul entraînement collectif, Pierre Mignoni a décidé de le lancer immédiatement, profitant de l’absence de Matéo Garcia.

Une entrée agitée mais pleine de caractère

Son entrée fut d’abord faite de contrastes. Défensivement appliqué sur sa première intervention en stoppant Velarte, il s’est ensuite retrouvé en difficulté sur un crochet intérieur de Duguivalu. Rattrapé par Ollivon, l’action s’est poursuivie et Albornoz a immédiatement présenté ses excuses à Serin et Sinzelle. Une défaillance logique pour un joueur encore en découverte de ses repères. Derrière, le Puma a très vite rectifié la mire.

Couverture aérienne, chandelle propre, prise d’initiative balle en main : l’Argentin a joué juste. Moins distributeur que finisseur, il a choisi le duel trois fois plutôt que la passe, grattant chaque mètre et mettant la défense catalane sous tension. Ce choix d’incision plutôt que d’orientation du jeu a surpris mais séduit. Pour un premier contact, le message semblait clair : Albornoz ne vient pas seulement pour animer, mais pour briser des lignes.

Deux actions qui font basculer Mayol

À cinq minutes du terme, la scène est déjà prête à entrer dans les mémoires. Depuis ses cinq mètres, le Puma se retrouve ballon de récupération en main. En face, un avant : l’opportunité est trop belle. Il fixe, crochet extérieur, accélération. Yato est battu, Forner aussi. Velarte est dépassé, Duguivalu finit par l’attraper en bout de course après cinquante mètres de remontée. Il garde le ballon plutôt que d’offrir à Serin, choix personnel assumé pour un premier frisson partagé avec tout Mayol.

Quelques secondes plus tard, malgré la fatigue, il voit l’espace et tente une diagonale parfaite au pied pour Dréan. L’ailier, cramé mais lucide, capte et conclut. Poing levé, Serin, Sinzelle et Ludlam se ruent sur lui. « Il a été énorme et son niveau va encore monter. Deux jours d’entraînement seulement… c’est fou ! » souffle Ludlam au micro.

L’Argentine valide, Mignoni tempère mais sourit

Leonardo Senatore, consultant ESPN et ancien troisième ligne du RCT, s’enflamme : 

« Ce n’est que le début. Tomás est un joueur extraordinaire, un grand chef d’orchestre, qui connaît bien le rugby. Il est capable de détruire toutes les meilleures défenses du monde. En plus, c’est un guerrier en défense. C’est un guerrier comme les Toulonnais les aiment. Il y a quelques mois, on avait discuté de cette possibilité pour lui de rejoindre le RCT. Il était déjà excité. Je lui ai dit que c’était le meilleur endroit du monde pour jouer au rugby. Je sais qu’il appréciera sa vie là-bas, et que les Toulonnais vont se régaler de le voir jouer. Il va électriser les supporters. Pour dire la vérité, je sais qu’il a la possibilité d’être le digne successeur de Jonny Wilkinson. Pour moi, il joue dans la même catégorie que les meilleurs ouvreurs du monde. Je suis certain d’une chose : les supporters vont rapidement voir son impact.

Vous savez, pour nous, les Argentins, il est difficile d’aller jouer en Europe quand nous ne sommes pas installés avec les Pumas. Il a longtemps évolué dans l’ombre de Nico (Sanchez). Il n’a jamais eu sa chance. Pour lui, c’est l’heure de montrer son talent avec les meilleurs. Il a un talent fou et rare. C’est simple, il sait tout faire en défense, en attaque, et avec son pied gauche. »

Pierre Mignoni, lui, veut garder le cadre. « Il a une expérience, mais pas encore celle du Top 14. C’est un championnat dur, il doit se fondre dans l’équipe. Mais oui, il redessine la hiérarchie à ce poste. C’est très bien de l’avoir maintenant ».

Au bout de 20 minutes : 2 défenseurs battus, 2 franchissements, 51 mètres parcourus et un stade conquis