Valérie Narjissi : « À la fin, j’ai dégoupillé, je lui ai sauté dessus et j’ai eu un blanc »

Valérie Narjissi : « À la fin, j’ai dégoupillé, je lui ai sauté dessus et j’ai eu un blanc »

Le samedi 18 octobre 2025 à 0:35 par David Demri

0 Commentaire

Publicité


Plus de quatorze mois après la mort tragique de leur fils Medhi Narjissi, âgé de 17 ans, survenue lors d’un stage de l’équipe de France U18 en Afrique du Sud le 7 août 2024, ses parents continuent de se battre pour obtenir des réponses.

Ce vendredi 17 octobre, Jalil et Valérie Narjissi ont été entendus par le comité d’éthique et de déontologie du rugby, un organe indépendant de la Fédération française de rugby (FFR).

Le Parisien fait le point sur cette audience.

L’audition, qui se tenait au siège du Comité national olympique et sportif français (CNOSF) à Paris, n’a fait qu’ajouter à leur désillusion.

Face à six membres du comité, dont l’ancien sélectionneur Pierre Villepreux, les parents ont eu le sentiment d’être reçus par des personnes « dépassées » et « qui semblaient tout découvrir ». Des échanges marqués, selon eux, par un manque d’écoute et de préparation. « Il était identifié comme un haut potentiel du rugby, il avait tant d’années à vivre et il a pris perpétuité », ont-ils soufflé, la voix brisée.


Une quête d’éthique, pas de vengeance

Les Narjissi avaient saisi ce comité dès le printemps, espérant qu’il se pencherait sur l’attitude des dirigeants fédéraux, notamment celle du président Florian Grill, qu’ils jugent contraire aux valeurs d’éthique et de solidarité que le rugby revendique.

« Si même ces gens-là ne font rien, alors ce sera la preuve que ce monde du rugby est pourri jusqu’à la moelle », lâche Valérie Narjissi, amère.

Le comité, présidé par Bernard Foucher, conseiller d’État honoraire, devrait rendre son avis dans les trois à quatre semaines. Une attente supplémentaire, difficile à supporter pour des parents qui, depuis quatorze mois, se heurtent à la lenteur et au silence institutionnel. « On n’a pas perdu un ballon, ni même notre chien. Notre fils, mineur, a disparu de l’autre côté de la planète », répète Jalil Narjissi.


La justice, elle, avance lentement mais sûrement

Sur le plan judiciaire, le dossier reste ouvert. La famille a récemment été reçue par la nouvelle juge d’instruction, Agnès Navarro, en remplacement de Serge Rey, parti à la retraite. Selon leurs avocats, la magistrate s’intéresse de près aux responsabilités hiérarchiques et aux éventuelles défaillances de sécurité ayant conduit à la noyade du jeune joueur.

Deux hommes sont déjà mis en examen pour homicide volontaire : le préparateur physique Robin Ladauge, à l’origine de la baignade mortelle, et le manager Stéphane Cambos, accusé de ne pas avoir interrompu l’activité.

Mais la famille espère un élargissement de la plainte pour inclure d’autres responsables potentiels, notamment pour homicide involontaire, mise en danger de la vie d’autrui ou non-assistance à personne en danger.

« Imaginez un instant qu’un drame comme celui-là se soit produit dans le football… Vous imaginez le scandale ? », souligne Me Arnaud Péricard, l’un des avocats des parents.


Une confrontation douloureuse

Le 1er octobre, un nouvel épisode a ravivé la plaie. Les parents ont croisé Stéphane Cambos lors d’une audience au tribunal d’Agen, où ce dernier contestait sa mise en examen. En expliquant qu’il n’était pas le supérieur hiérarchique de Ladauge et qu’il n’avait fait que « constater » la baignade, le manager a provoqué la colère et l’incompréhension des Narjissi.

« Le plus difficile, raconte Valérie, a été sa nonchalance. Il jouait avec son stylo, prenait des notes sur un carnet FFR… Je cherchais à croiser son regard, jamais il ne m’a regardée. À la fin, j’ai dégoupillé. Je me suis plantée devant lui et je lui ai demandé quand, enfin, il allait me regarder dans les yeux. Puis, je lui ai sauté dessus. Après, j’ai eu un blanc. »

Cet accès de colère, vite maîtrisé, dit tout de l’épuisement et de la douleur d’un couple qui se bat contre le temps, le silence et l’indifférence.


L’attente, encore

Alors que le comité d’éthique doit désormais se prononcer et que la justice poursuit son enquête, Jalil et Valérie Narjissi continuent d’espérer que la mort de leur fils ne restera pas une simple tragédie administrative.
Ils veulent que la mémoire de Medhi, jeune joueur prometteur « plein de vie et de talent », serve à faire évoluer les pratiques et les consciences.

Car derrière leur combat, il ne reste qu’une exigence : la vérité et la dignité.

Publicité

0 Commentaire