Ils ne voulaient pas manquer ça. Dans la salle des spectacles de Gaillac, en cette fin d’après-midi, ils sont tous là, environ trois cents personnes, avec Gaston et Odette, les parents, aux premières loges. « C’est un grand jour , un événement, explique Gaston, quatre-vingt-sept ans, avec son accent qui fait “rrrouler” les “rrr”. Bernard ferait un très bon président. » Il y a aussi Christian et Gérard, les frères. Manon, l’épouse. Guy Massol, son ancien instituteur. « Il était sportif, raconte-t-il. Et c’était un chef. » Pas loin, Françoise Lafon, responsable des juniors Crabos du club local en 1982, montre une photo d’époque. Un jeune homme pas encore dégarni y tient le bouclier de champion de France. Au deuxième rang, on reconnaît un autre gamin du coin, Vincent Moscato.

Ce premier jour de septembre n’est vraiment pas un jour comme les autres à Gaillac. C’est là, dans cette ville où il a découvert le rug­by, que Bernard Laporte, cinquan­te et un ans, s’apprête à lancer officiellement sa campagne pour la présidence de la Fédération. Il arrive vers 18 heures. Veste bleu marine à fines rayures, chemise bleu ciel, en jean, il commence par serrer des mains des amis mais aussi des présidents de club présents pour écouter le candidat Laporte. On le sent à l’aise, heureux d’être là. À 19 h 5, il se lève et se dirige vers le pupitre avec son discours à la main. L’émotion affleure, mais l’animal politique reprend le dessus quand les premiers mots jaillissent  :« Le rugby amateur, c’est lui qui m’a fait. Personne ne va m’expliquer ce que c’est. »

Puis il s’adresse aux présidents de club, ceux qui voteront en ­décembre 2016. « La Fédération, ça doit être vous. La Fédération, c’est vous. Or, aujourd’hui, ce n’est pas vous. » Il envoie le premier missile en direction des dirigeants actuels : « La Fédération c’est Marcoussis. Une forteresse imprenable où on envoie des mails sans avoir de réponse. Je ne supporte plus qu’un salarié décide à la place des élus. La Fédération, c’est une poignée de personnes qui décide de construire un stade de 600 millions sans explication. C’est ça que je veux changer. » Il répéte : «La Fédé, c’est vous. » Et il appuie ce message en appelant à la mobilisation dans dix-huit mois.  « J’ai la certitude que nous allons gagner. Mais c’est vous, les clubs, qui allez décider, car seuls les représentants des clubs ont le droit de vote. Il faut que vous votiez. »

FAVORABLE À UN SPONSOR SUR LE MAILLOT BLEU

Le Laporte qui parle n’est pas ­celui qui entraîne le RCT. Le ton est calme. Il expose quelques grandes lignes de son projet en ­appuyant sur un choc de simpli­fication concernant la réglementation, les calendriers. « Être bénévole ne doit pas être un chemin de croix imposé par les dirigeants de Marcoussis », glisse-t-il. Un discours calibré pour séduire ce rugby amateur « d’où sortent les Bastareaud, les Michalak… »,  ces 1 885 clubs qu’il compte rencontrer durant sa campagne.  Il n’hésite pas à tutoyer les personnes dans l’auditoire, et plus le temps passe plus les mots s’envolent et le débit s’accélère. Il reparle de l’équipe qui dirige la FFR. « Je n’ai rien contre les gens qui sont en place. À ce jour, je suis le seul candidat et j’espère qu’il y en aura d’autres. Mais ce que je veux faire, c’est avoir des idées, de l’énergie, un certain goût pour le combat qui n’est pas pour me déplaire. Je veux tout simplement fédérer. »

Après vingt-cinq minutes de discours, il a droit à ses applaudissements. C’est ensuite les présidents de club qui échangent avec le candidat en évoquant de nouveau le chantier du grand stade. L’occasion pour Laporte de lancer deux idées : que l’équipe de France joue avec un sponsor maillot, et la création d’un nouveau Championnat de Troisième Division. Aujour­d’hui, Laporte poursuit sa campagne dans la très écoutée matinale de RMC – radio pour laquelle il travaille –, avant de se rendre à Biarritz et Tyrosse. Dans le comité du président sortant, Pierre Camou…

Source: lequipe.fr