Interrogé dans les colonnes du Midi Olympique, l’ex demi-de-mêlée Toulonnais, Aubin Hueber analyse la victoire de l’Irlande contre l’Angleterre, ce week-end, à l’occasion de la troisième journée du Tournoi des Six-Nations. Extrait:

Les Irlandais ont-ils surpris les Anglais en délaissant les choke tackle, cette technique de plaquage visant maintenir le porteur de balle debout et l’empêcher de libérer le ballon ?

Je crois que les Irlandais craignaient énormément le pouvoir de relance des Anglais notamment celui du triangle arrière. Du coup, ils ont cherché tout au long du match à faire tomber au sol le porteur de balle le plus rapidement possible. Ils ne voulaient pas laisser les Anglais prendre ce fameux mètre d’avantage. C’est comme pour un moteur lorsque tu coupes la courroie de transmission, il n’avance plus. Là, la courroie ce sont les jambes. Derrière, les Irlandais venaient systématiquement gratter le ballon dans les rucks. Ils ont d’ailleurs bénéficié de trois turnovers rien qu’au sol.

Pourquoi les Anglais ne sont-ils jamais parvenus à trouver la clé dans la défense irlandaise ?

Les Irlandais ont fait preuve d’une organisation sans faille. Ils ont été très solidaires. Chaque fois que les Anglais sont parvenus à ouvrir une brèche, il y avait toujours quelqu’un pour rattraper le coup. Ils ont toujours réussi à réalimenter très vite les premiers et rideaux. Conor Murray a également bien couvert derrière avec ses deux ailiers. Voilà pourquoi les Anglais ne se sont pas créé des occasions franches comme à leur habitude. Ils ne sont pas parvenus à jouer dans leur dos.

À l’image de l’essai inscrit par Robbie Henshaw, les Irlandais n’ont-ils bâti leur succès grâce à leur supériorité dans les duels aériens ?

Ils n’ont pas à l’heure actuelle d’équivalent au monde dans ce secteur. Les Irlandais disposent en Tommy Bowe, Rob Kearney et Simon Zebo de joueurs très forts pour aller disputer le ballon dans les airs. Cela vient de leur incroyable timing au niveau du saut. Ils ne se posent pas de questions pour aller au charbon. Sur l’essai, Murray joue parfaitement le coup en poussant l’avantage au maximum. Voyant Goode isolé, il tape dans l’angle mort. Comme l’arrière anglais est en marche arrière, il ne voit pas arriver Henshaw dans son dos.

Henshaw a-t-il enfin pris ses marques ?

Il est encore un peu trop tôt pour dire s’il va fairen oublier O’Driscoll. Mais j’ai trouvé Henshaw très percutant sur chacune de ses prises de balle et très efficace au plaquage. Il n’est pas le seul à avoir tiré son épingle du jeu. Toner a non seulement été le roi des airs, mais il a en plus fait admirer toute sa dextérité balle en main. Pour un joueur avec des segments comme le sien (il mesure 2,08 m, N.D.L.R), je le trouve extrêmement disponible. Jordi Murphy a parfaitement remplacé Jamie Heaslip en numéro 8 en se montrant très bon au sol et en amenant beaucoup de puissance. L’animation offensive autour de la charnière a été remarquable. Quand un joueur allait au contact, il y avait systématiquement deux ou trois gars autour qui convergeaient vers le ruck pour libérer rapidement le ballon. A contrario des Anglais, les Irlandais sont parvenus à mettre beaucoup de vitesse dans leurs libérations de balle. Le ballon mettait tout juste deux secondes avant d’être éjecté.