Après trois mois d’absence, Juan Martin Fernandez Lobbe sera dans le groupe ce week-end en Coupe d’Europe contre l’Ulster. Une bonne nouvelle pour Toulon qui a bien besoin de son stratège et meneur d’hommes.

S’IL N’AVAIT pas disputé le Four Nations avec l’Argentine jusqu’au mois d’octobre, et donc raté le début du Top 14 avec Toulon, Juan Martin Fernandez Lobbe (33 ans) aurait été désigné capitaine du RCT cette saison pour succéder à Jonny Wilkinson. Bernard Laporte, le manager, a finalement choisi le pilier all black Carl Hayman. Mais le troisième-ligne argentin (61 sélections) joue un rôle prépondérant au sein du groupe varois. « Il fédère, reconnaît Laporte. Il a un rôle moteur. Il parle vrai, il est charismatique. »

L’Argentin n’est pourtant pas du genre grande gueule. N’a pas un ego surdimensionné non plus. « Il ne se met jamais en avant, il est très calme », poursuit Laporte. « Mais quand il parle, tout le monde écoute car son intelligence va au-delà du jeu », assure Jacques Delmas. Pour l’entraîneur des avants, Juan Martin Fernandez Lobbe est le « ciment du RCT ». « Il est très discret, mais il a une importance capitale dans le leadership, poursuit Delmas. C’est le référent. Dès qu’il est présent, sa personnalité pèse sur le groupe. »

Son retour tombe à pic. Après avoir battu le Racing-Métro (32-23) et conforté sa troisième place en Top 14, Toulon reçoit l’Ulster en Coupe d’Europe, samedi. Un succès pourrait permettre aux Toulonnais d’assurer leur qualification en quarts de finale. L’Ulster, c’est d’ailleurs le dernier adversaire de l’Argentin, le 25 octobre (23-13). Le troisième-ligne avait quitté ses partenaires après seulement deux minutes de jeu, victime d’une déchirure à la cuisse droite.

Philippe Saint-André, qui l’a lancé à Sale en 2006 puis embarqué avec lui à Toulon en 2009 – « C’est le premier que j’ai coché sur ma liste », glisse le sélectionneur des Bleus – le considère comme « un régulateur de vestiaire ». Il est un relais entre le staff et les joueurs, un rôle facilité par son côté chaleureux et protecteur. « Il est bien avec tout le monde, détaille l’ancien talonneur des Pumas Mario Ledesma, qui le connaît depuis tout gamin. Les jeunes, les vieux, ses voisins, tout le monde l’aime. C’est un mec très simple, très joyeux, qui s’intéresse aux autres. C’est pour cette raison que tout le monde adhère. Et il n’a pas besoin du brassard pour ça. » Saint-André complète le tableau : « Il a une faculté d’adaptation spectaculaire. Il sait parler couramment espagnol, anglais et français. » Ce qui, dans un vestiaire aussi polyglotte que celui de Toulon, n’est pas le moindre de ses atouts. « Il irait au Japon, il parlerait japonais en moins de six mois ! »

LEDESMA : « TU VERRAIS CE QU’IL FAIT FAIRE À SON CHIEN ! »

Si Juan Martin Fernandez Lobbe fait l’unanimité, c’est aussi en raison de son comportement sur le terrain, selon Mario Ledesma, qui compte 31 sélections et deux Coupes du monde (2007, 2011) à ses côtés avec les Pumas : « Quand il dit un truc, il le fait. Tu as envie de le suivre car ses paroles se transforment en actes. Dès qu’il enfile un maillot, il se transcende. » Fernandez Lobbe est aussi un compétiteur-né. « Même s’il joue à toucher sur un parking avec toi, il sera pareil, témoigne Ledesma. Il ne lâchera rien, il voudra gagner. »

L’Argentin est un perfectionniste, et ça ne date pas d’hier. Avant même de s’envoler pour l’Angleterre et débuter sa carrière professionnelle à Sale, en 2006, le troisième-ligne a souhaité terminer ses études d’ingénieur en Argentine. Dans l’une des meilleures écoles du pays, évidemment. Un côté jusqu’au-boutiste qui lui colle à la peau. « Tu verrais ce qu’il fait faire à son chien ! », se marre Ledesma. Renseignements pris, Fernandez Lobbe est un inconditionnel des émissions de Cesar Millan, un dresseur de chien mexicain, sur la chaîne National Geographic. Encore et toujours pour assouvir sa soif d’apprendre. « Il est très demandeur », confirme Laporte. « C’est une éponge, ajoute Saint-André. Il ne fait jamais deux fois la même erreur. » « Il cherche toujours à apprendre. Il est dans une éternelle remise en question », insiste Ledesma. « Il ne laisse rien au hasard », conclut Delmas.

Une philosophie de vie qui a fait de Fernandez Lobbe l’un des meilleurs troisième-ligne au monde. Philippe Saint-André, qui l’a entraîné pendant cinq saisons, affirme : « Il plaque, il conteste, il saute en touche, il fait jouer les autres, il est toujours disponible et fait le lien entre les avants et les trois-quarts. Il peut jouer 6, 7 ou 8. Sa panoplie est infinie. Et en plus d’avoir un moteur énorme, il a des neurones. Qu’il soit là ou pas, ce n’est pas la même équipe de Toulon. Juan est un joueur à part. Aujourd’hui, il est à son apogée. »

Source: lequipe.fr – Maxime Raulin