Serge Milhas: « Samedi, on essaiera de les faire douter si on peut »

Serge Milhas: « Samedi, on essaiera de les faire douter si on peut »

Le vendredi 30 mai 2014 à 10:13 par David Demri

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LAROCHELLE_MILHAS_170511Serge Milhas, entraîneur du Castres Olympique, évoque les ressorts qui ont permis à son équipe de retrouver le Stade de France et Toulon en finale du Top 14.

C entre d’entraînement du Lévézou, lundi dernier. Serge Milhas reçoit dans son bureau. L’entraîneur des avants du CO est détendu, même s’il fuit généralement l’exercice médiatique. Ce Tarbais d’origine, Gersois d’adoption, n’aime pas parler de lui. « Je ne veux pas que vous fassiez un portrait de moi » , nous avait-il prévenu. On a quand même essayé de le faire parler de sa première finale du Championnat perdue face au Stade Français (23-28), du temps où il coachait Colomiers, en 2000. « Hou là ! Il y a longtemps que j’ai oublié tout ça. » Du temps où Mourad Boudjellal, le président toulonnais, lui avait proposé de devenir l’adjoint de Philippe Saint-André en charge des avants, aussi, en 2011. S’il n’avait pas finalement choisi Biarritz (d’où il fut viré un an et demi plus tard), Milhas aurait donc très bien pu se trouver sur le banc du RCT, samedi, et non sur celui du CO. « Les circonstances de la vie t’amènent où elles doivent t’amener, dit-il. Je ne me pose pas cette question. » On a donc recentré l’entretien sur sa première saison sur le banc de Castres, aux côtés de son acolyte David Darricarrère (entraîneur des arrières).

« Êtes-vous fier d’avoir ramené cette équipe en finale du Top 14 ?

– Non. Il n’y a aucune fierté. Juste de la satisfaction d’avoir fait adhérer les mecs à nos idées. Mais on n’a rien révolutionné, même si on a forcément apporté un discours différent (des précédents entraîneurs Laurent Labit et Laurent Travers) et quelques petites évolutions liées à nos convictions. On n’a rien imposé, on a juste proposé.

Quoi, par exemple ?

– Je voulais que cette équipe soit capable de jouer plusieurs formes de rugby. Parce qu’il faut savoir maîtriser toutes les facettes de ce jeu pour pouvoir s’adapter à n’importe quelle circonstance de match. Aujourd’hui, dans le rugby, personne n’est capable d’imposer son jeu à tout le monde. À moins de venir d’une autre planète. Ou de s’appeler Toulon.

Avez-vous craint de faire fausse route à certains moments de la saison ?

– Il y a eu la défaite à Brive (0-34, le 5 octobre 2013), qui a été un mal pour un bien. Il nous a manqué six mois d’adaptation pour mieux connaître le groupe. On a notamment découvert la gestion des internationaux pendant les doublons. On n’a pas bien anticipé l’état de fatigue mentale et physique des mecs. Ce problème, on l’a surtout rencontré avec les deux ou trois gars qui sont montés en début de semaine à Marcoussis avant d’en redescendre trois jours plus tard(Palis, Lamerat, Claassen et Forestier). Tu suis un discours pendant trois jours en sélection et quand tu rentres au club, tu en écoutes un autre. C’est difficile pour les joueurs de passer de l’un à l’autre en moins de vingt-quatre heures.

Que vous inspirent les Toulonnais ?

– Ils sont champions d’Europe. Ils maîtrisent leur sujet avec des grands joueurs aux postes clés et même aux autres postes. Samedi, on essaiera de les faire douter si on peut, mais…

Vous disposez aussi de grands joueurs, non ?

– Oui, mais eux ils ont Wilkinson, Giteau, Botha, des mecs à quatre-vingts sélections ou plus, des champions du monde… Et quand des joueurs de ce calibre-là arrivent à jouer ensemble, ça devient très compliqué pour l’adversaire.

Bernard Laporte s’est beaucoup inspiré de Jacques Fouroux (ancien sélectionneur du quinze de France). Pas vous ?

– Moi, j’ai surtout été marqué par Jacques Brunel (son entraîneur à Colomiers), mais tu ne peux pas avoir passé vingt ans à Auch sans avoir croisé un jour Jacques Fouroux. Et quand tu rencontres un type comme lui, tu ne restes pas insensible. Mais pourquoi me parlez-vous de lui ?

Parce qu’on retrouve parfois chez vous quelques attitudes ‘’fourouxiennes », comme lorsque vous êtes accroupi à côté des gros sur les mêlées…

– Non, je suis moi. Je ne me compare à personne. Après, quand tu croises des personnes qui ont autant réussi et apporté au rugby que lui, tu en retiens forcément quelque chose qui t’aide à progresser. Mais je ne pense pas être à la hauteur de tout ce qu’il a fait.

Vous êtes un ancien demi de mêlée. Pourquoi avez-vous choisi d’entraîner les avants et pas les trois-quarts ?

– Question de sensibilité. Il me semble qu’un demi de mêlée doit tout comprendre du jeu d’avants. C’est d’ailleurs ce que je demande à mes 9 aujourd’hui. Mais je ne m’interdis pas d’intervenir auprès des trois-quarts et David (Darricarrère) ne s’interdit pas d’intervenir auprès des avants. On gère le collectif ­ensemble.

Soulever le bouclier de Brennus a-t-il toujours fait partie de vos rêves ?

– Non. Le rugby, c’est d’abord une aventure humaine. C’est justement Fouroux qui disait : ‘’À la fin des matches, perdus ou gagnés, il ne reste que des hommes. » Perso, j’ai oublié les victoires. Et encore plus les défaites.

C’est également le discours de Laporte, qui dit se moquer des trophées et des records…

– Exactement. On a reçu cette semaine un petit mot d’un ancien joueur de La Rochelle des années 1950 qui disait qu’il était content pour nous. Pourtant, je ne pense pas qu’on ait beaucoup donné à cet homme du temps où on entraînait La Rochelle (2007-2011) avec David. Mais on lui en a donné suffisamment pour qu’il nous envoie ce mot. Si je suis resté dans ce milieu, c’est pour ces relations humaines-là. Elles peuvent être conflictuelles, parfois, mais derrière le conflit se cache toujours le respect. On n’entre jamais en conflit avec quelqu’un qu’on ne respecte pas. Moi, si je ne respecte pas quelqu’un, je l’ignore. »

Source: lequipe.fr

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