Deux matchs, un destin. Celui qui mène à Twickenham. À la gloire. À la revanche. Autant de notions à même de faire vibrer les peuples clermontois et toulonnais, à une seule condition : celle de gagner. Vaincre « à domicile » sur des terres de foot où, symbolique oblige, les deux clubs ne recevront pas le même accueil.

« Quand on mélange le jaune et le bleu, on obtient du vert, sourit Thierry Fraisse, président de l’Interclub des supporters de l’ASMCA. Clermont et Saint-Étienne ne sont qu’à une heure de route et entretiennent des relations particulières. Pour voir des matchs de foot, les Clermontois descendent à Saint-Étienne et pour voir du rugby, les Stéphanois montent à Clermont-Ferrand. Geoffroy-Guichard, c’est le chaudron, Marcel-Michelin, c’est une marmite. Entre les deux clubs, il y a beaucoup de similitudes… »

Des relations idoines que les Toulonnais ne partagent pas avec leurs homologues de l’OM, rivalité historique entre les villes obligent. « Lors de nos déplacements, nous avons toujours de bons retours des commerçants marseillais, auprès desquels nous sommes réputés pour être plus calmes que les supporters du foot, explique de son côté Patrick Fornet, président des Mordus du RCT. En revanche, auprès des supporters de l’OM, j’ai clairement vu sur les réseaux sociaux que nous n’étions pas les bienvenus à leurs yeux. Entre Marseille et Toulon, il n’y a jamais eu de relations exceptionnelles. Cela date de la grande époque du SCT, à l’époque de Courbis, qui rivalisait à l’époque avec l’OM. Certains supporters marseillais en sont restés là… »

MARSEILLE : DES TARIFS PROHIBITIFS ?

Des accueils différents, donc, qui impliquent en creux un engouement différent, exalté par des souvenirs également dissemblables.

« Les supporters clermontois ont de superbes souvenirs à Geoffroy-Guichard, explique Thierry Fraisse. En 2006, Bourgoin y avait organisé un match qui avait été un déclic, car énormément de supporters s’étaient mobilisés et avaient fait de ce déplacement un match à domicile. Il y a aussi, bien sûr, eu cette demi-finale d’anthologie en 2010 qui nous avait ouvert le chemin du titre. J’espère un match semblable cette année, en espérant que l’on s’y caille un peu moins… »

« Pour nous qui sommes superstitieux, c’est un peu différent, souffle Patrick Fornet. Avant Toulouse, depuis la défaite contre Cardiff en 2009 en finale du Challenge, nous n’avions plus perdu au Vélodrome. Avant d’y recevoir Toulouse, j’étais confiant. Je le suis un peu moins aujourd’hui… »

De quoi expliquer le début d’une désaffection, avec une affluence estimée à 40 000 personnes, alors que le Vélodrome peut en accueillir 67 000 ? « C’est malheureux à dire, mais très honnêtement, je ne ressens pas un engouement énorme pour cette demi-finale, déplore Fornet. Est-ce que l’on est blasé ? Peut-être un peu… C’est la troisième année consécutive que nous sommes en demi-finale, et nous sommes déjà allés à Marseille il n’y a pas si longtemps cette saison. Il y a aussi le prix des places, qui est exorbitant. 55 euros en virage, 88 euros en Ganay… Et puis, dans quinze jours, il faudra peut-être remettre ça… Si bien que beaucoup ont choisi d’économiser en vue de la finale et du week-end à Londres. Sans parler que si tout va bien, il peut aussi y avoir Bordeaux et le Stade de France. Heureusement que je n’ai pas calculé ce que m’a coûté le RCT depuis trois ans, sinon je serais sur le point de divorcer… »

SAINT-ÉTIENNE : RECORD D’AFFLUENCE ET ARRÊTÉ MUNICIPAL

Des considérations dont les Auvergnats, toujours en quête d’une première étoile européenne, se situent aujourd’hui à des années-lumière. Même si l’affluence record attendue dans le « nouveau » Geoffroy-Guichard (41 700 spectateurs attendus) sera finalement similaire à celle du Vélodrome.. « La différence, c’est que le stade sera à guichets fermés, s’exclame Thierry Fraisse. Nous serons plus de 30 000 Clermontois. Dans les premiers jours, nos supporters étaient allés acheter des places sur le site des Saracens, et les 2 000 places qui sont revenues d’Angleterre ont trouvé
preneur en quelques heures dans la semaine… »

De quoi prévoir une atmosphère extraordinaire dans un chaudron coloré de jaune et bleu ? « Ce sera difficile de mettre totalement le stade à nos couleurs, car en tant que supporters, nous n’aurons à notre disposition que les tribunes Point et Paret. Mais nous allons distribuer 20 000 drapeaux, ce qui va contribuer à l’ambiance. » Au moins autant que l’arrêté municipal dans la semaine par le maire de Saint-Étienne Gaël Perdriau, autorisant exceptionnellement la vente d’alcool samedi à Geoffroy-Guichard. Une disposition à laquelle il faut ajouter la proposition du club de rugby du CA Saint-Étienne, situé juste à côté de Geoffroy Guichard, lequel mettra son terrain à disposition un pique-nique géant. Ouvrant en outre, cela va de soi, ses buvettes pour l’occasion. Une bonne raison pour inciter les supporters à arriver tôt…

QUATRE-VINGT BUS SUR LES ROUTES CE WEEK-END

Au vrai, la question de la transhumance des supporters constituera encore un enjeu majeur pour la réussite des événements. « À ceux qui souhaiteront venir par leurs propres moyens, nous suggérons de partir très tôt, explique Thierry Fraisse. On se souvient qu’en 2009 nos supporters avaient créé un énorme bouchon à l’entrée de Saint-Étienne. Et en ce qui concerne les transports en commun, l’Interclub organisera 22 bus, tandis que nous nous sommes rapprochés d’un autocariste pour transporter les non adhérents… Au total, ce sont quasiment cinquante bus qui partiront de Clermont. »

Un chiffre un peu plus élevé que les trente prévus par les Toulonnais qui, il est vrai, disposeront d’autres moyens de locomotion. Même si l’heureuse initiative prise par Mourad Boudjellal de mettre en place, avec la complicité de la région PACA, à savoir un « pack SNCF » permettant un aller-retour Toulon-Marseille à 10 euros, ne sera pas renouvelée. « J’ai appelé le club mardi, et rien n’est prévu, au contraire du match contre Toulouse en championnat, constate Patrick Fornet. Mourad s’en fout, et il n’a pas tort sur le principe, puisque c’est l’EPCR qui encaisse la recette. »

De quoi inciter les caciques de l’EPCR à réviser leur mode de fonctionnement en vue des prochaines saisons ? Le président du RCT l’a en tout cas expressément appelé de ses voeux. « C’est difficile de remplir 67 000 places en quinze jours. Je pense qu’à l’avenir, les dirigeants de l’EPCR devront faire en sorte de changer le règlement de désignation des stades, de façon à mettre en vente les places les ventes un peu plus tôt. »

Car si l’affluence de Marseille ne fera en aucun cas regretter à l’EPCR le choix de Vélodrome, la question de l’image de la toute nouvelle compétition risque de se poser en cas de tribunes vides trop visibles à la télévision.

Source: Midi Olympique